Ceux qui enseignent que Christ, en S'incarnant, a pris une nature
humaine non pécheresse, c'est-à-dire la nature spirituelle d'Adam
avant la chute, s'opposent à la vérité que Christ a assumé notre
nature pécheresse, la nature d'Adam après la chute et ses tendances
au péché; ils le font avec sincérité, par souci de préserver l'état
parfaitement immaculé de notre Sauveur. Voici quels sont leurs
principaux arguments :
- Si Christ avait pris la nature pécheresse telle que nous la
connaissons, Il aurait été souillé par le péché et n'aurait pu,
par conséquent, être l'Agneau de Dieu sans tache mais Il serait
devenu un pécheur ayant Lui-même besoin de rédemption.
- Bien que Christ ait assumé notre humanité, les Écritures Le
décrivent comme une « chose sainte », « sans péché »,
« séparé(e) des pécheurs » (
Lc 1 :35, KJV;
He 4 :15;
7 :26
). Sa nature spirituelle était donc comme celle d'Adam avant la
chute.
- Christ n'aurait pas pu résister à la tentation si Sa nature
humaine avait été pécheresse en tous points comme la
nôtre.
- Christ est le second Adam; Il a donc pris la nature spirituelle
non pécheresse du premier Adam.
Puisqu'une juste conception de l'humanité de Christ est essentielle à
une bonne compréhension du salut, aussi bien de la justification que
de la sanctification et de la glorification, ces objections,
provenant d'hommes de Dieu sincères, ne peuvent être ignorées.
Considérons-les donc avec un souci de vérité, d'unité, et de clarté
de l'évangile, afin que l'objectif divin d'éclairer ce monde de
ténèbres de Sa gloire puisse bientôt devenir une vivante réalité.
1. L'argument selon lequel Christ aurait été souillé par le
péché et n'aurait pu être l'Agneau de Dieu sans tache s'Il avait pris
notre nature pécheresse, provient de la doctrine du
« péché originel ». Cette doctrine, comme nous l'avons vu
précédemment, enseigne que, par suite de la chute d'Adam, la nature
humaine pécheresse est condamnée en vertu de ce péché inhérent à
l'homme (
Rm 5 :18;
7 :20-23
). Il s'ensuit, pense-t-on, que si Christ avait pris cette nature
pécheresse, Il serait automatiquement devenu un pécheur condamné
comme le sont tous les hommes dès leur naissance.
Il est exact que Paul se réfère à notre humanité pécheresse en tant
que « corps du péché » (
Rm 6 :6
) parce qu'en elle habite « la loi du péché et de la mort » (
Rm 7 :18
), mais le problème du péché originel ne peut s'appliquer à Christ à
cause de Sa double nature et du caractère unique de la personne de
notre Sauveur.
Lors de l'incarnation, la divinité de Christ a été mystérieusement
unie à notre humanité en quête de rédemption, de sorte que Christ est
devenu en même temps Dieu et homme. Il est cependant important de
préserver la distinction entre ces deux natures, ce que les
réformateurs du seizième siècle n'ont malheureusement pas réussi.
Dans l'incarnation, Christ a pris sur Sa propre nature divine non
pécheresse notre nature humaine pécheresse. C'est pour cette raison
que chaque fois que la Bible se réfère à l'humanité de Christ, elle
utilise le terme « fait ». « La Parole a été faite chair » (
Jn 1 :14
); « Il l'a fait devenir péché » (
2 Co 5 :21
); « né (fait) d'une femme » (
Ga 4 :4
); « étant devenu (ayant été fait) malédiction » (
Ga 3 :13
); « fait de la semence de David » (
Rm 1 :3,
KJV). Le mot « fait », nous l'avons déjà vu, signifie que Christ est
devenu ce qu'Il n'était pas par nature.
Le fait que Christ ait réellement et véritablement assumé notre
nature pécheresse soumise à la malédiction de la loi et ainsi
condamnée à mort ne signifie pas que Christ soit Lui-même devenu
pécheur ou que Son sacrifice ait été imparfait; car cette nature
humaine n'était pas la Sienne par droit de naissance, mais Il l'a
assumée (prise en charge) afin de sauver la race humaine déchue. Si
Christ avait cédé aux tendances pécheresses de la chair ne serait-ce
que par une seule pensée, Il serait devenu pécheur coupable au même
titre que nous. Mais tant qu'Il n'a pas soumis Sa volonté ou Son
esprit à notre nature pécheresse qu'Il a assumée, Il ne pouvait pas
être considéré comme un pécheur.
Il est vrai que l'Écriture nous dit qu'Il a été tenté en tous points
comme nous le sommes (c'est-à-dire par la chair, voir
Jc 1 :14
), mais Il n'a jamais péché (
He 4 :15
), en dépit du fait qu'Il a pris sur Lui notre nature pécheresse en
S'incarnant, nature qu'Il a incidemment purifiée à la croix.
C'est pourquoi Paul fait bien attention d'utiliser le mot
« ressemblance » quand il dit que Dieu envoya Son Fils dans une
« chair pécheresse » pour condamner « le péché dans la chair » (
Rm 8 :3
). Alors que l'Écriture reconnaît d'une part que Christ S'est
identifié à notre situation totalement pécheresse (
He 2 :14-18
), elle explique aussi clairement qu'Il n'était pas tout à fait
comme nous, c'est-à-dire pécheur; car « cela est impossible. »
Selon The International Critical Commentary (Romains, vol. 1, éd.
1982), Paul utilise le mot « ressemblance » dans
Romains 8 :3
pour mettre l'accent sur le fait que « lorsqu'Il a été envoyé par
Son Père, le Fils de Dieu n'a pas été changé en un homme mais a
plutôt assumé la nature humaine tout en restant le même. »
Considérant ce fait, le commentaire conclut : « L'idée de Paul était
que le Fils de Dieu a assumé la même nature humaine déchue que la
nôtre, qui n'a cependant jamais constitué en Lui la totalité de Son
Être Il n'a jamais cessé d'être le Fils éternel de Dieu. »
Nous pouvons expliquer la chose de cette façon : tout croyant né de
nouveau devient « participant de la nature divine » par l'expérience
de la nouvelle naissance (
2 P 1 :4
). Bien que cette nature divine soit non pécheresse, elle ne rend
nullement le croyant immaculé par nature, même si l'Écriture le
déclare enfant de Dieu (
Rm 8 :16;
1 Jn 3 :1-2
). Tout simplement parce que cette nature divine ne lui appartient
pas en vertu d'un droit de naissance. De même, le fait de participer
à notre nature pécheresse ne fait pas de Christ un pécheur puisque
la nature humaine ne Lui appartenait pas par droit de naissance. Il
l'a assumée afin de la racheter, ce qu'Il a accompli par Sa vie
d'obéissance et par Sa mort. Par conséquent, tant que Christ n'a pas
Lui-même consenti à pécher ou à céder d'une façon quelconque devant
la tentation, Il est resté sans tache.
De nouveau, ceux qui insistent sur le fait qu'en prenant notre nature
pécheresse, Christ se serait disqualifié pour être l'Agneau de Dieu
immaculé, n'ont pas compris le rapport symbolique du sanctuaire avec
l'oeuvre rédemptrice de Christ. Toute l'humanité se trouve sous la
condamnation et la malédiction de la loi à cause de la chute (
Rm 5 :18;
Ga 3 :10
). Pour que la race déchue puisse être rachetée de la condamnation et
de la malédiction, et pour que son statut puisse se transformer en
une justification qui donne la vie, la loi de Dieu impose deux
exigences :
- La loi exige une obéissance parfaite comme qualification pour
entrer dans la vie. C'est ce que Christ a accompli par Ses 33
années d'obéissance active à la loi de Dieu dans notre humanité
qu'Il assuma. Mais cette obéissance, tout en étant absolument
parfaite et sans péché, ne pouvait pas purifier notre humanité
de la malédiction et de la condamnation de la loi. Seule la mort
pouvait légalement nous libérer du péché (
Rm 6 :7
). Et jusqu'à ce que Christ ait amené cette humanité à la croix
et l'ait soumise au plein salaire du péché, Il ne pouvait Se
qualifier pour être notre justice (
Rm 4 :25
). Par conséquent :
- Christ a dû satisfaire à la seconde exigence de la loi, la
justice, en mourant pour nous sur la croix. Ainsi, tant par Sa
vie qui a satisfait aux exigences précises de la loi que par Sa
mort qui a payé le prix exigé par la justice de la loi, Christ
a obtenu pour l'humanité une rédemption éternelle (
He 9 :12
) et Il est devenu pour toujours le Rédempteur du monde (
Jn 5 :24
).
C'est dans cette optique seulement que nous pouvons comprendre le
symbolisme de l'Ancien Testament. Par Son obéissance parfaite et
réelle à la loi, Christ a accompli le symbolisme de l'Agneau sans
tache, ce qui Lui a permis de Se qualifier pour affronter la justice
de la loi pour nous. Nous ne trouvons nulle part dans l'Écriture
d'indication à l'effet que l'Agneau sans tache ait représenté la
nature humaine non pécheresse de Christ. Ce n'est qu'une hypothèse
qui ne peut être prouvée explicitement par la Parole de Dieu.
Le symbole de l'Agneau sans tache se rapporte à notre salut et
représente l'obéissance parfaite de Christ aux exigences requises par
la loi afin de nous qualifier pour la vie. Quand l'Agneau sans tache
a été immolé, Il représentait le sang ou la mort de Christ qui nous
purifie du péché (
He 9 :22-28
). Ces deux exigences étaient nécessaires pour justifier l'homme.
C'est sans aucun doute ce qu'avait à l'esprit l'auteur de l'épître
dans
Hébreux 10 :5-10 et 14.
Si Christ avait pris la nature non pécheresse d'Adam pour être notre
représentant et notre substitut, la loi n'aurait exigé de Lui qu'une
stricte obéissance, comme elle l'a fait avec Adam. Mais comme Il
venait sauver l'homme déchu et non l'homme sans péché, il fallait
que nos péchés issus de la chair soient condamnés à leur source même,
c'est-à-dire dans la chair, ce que Christ a fait en assumant cette
même chair pécheresse et en la soumettant à la mort sur la croix. Il
a ainsi « condamné le péché (au singulier) dans la chair » (
Rm 8 :3 ).
Encore une fois, certains prétendent que si Christ avait assumé la
nature pécheresse telle que nous la connaissons, Son obéissance
parfaite aurait été souillée par le « canal corrompu » au travers
duquel elle s'est accomplie. De nouveau, ceci ne peut être prouvé
par les Écritures.
Il est vrai que l'obéissance parfaite de Christ ne pouvait pas comme
telle justifier la race déchue à cause du « canal corrompu » qui
restait condamné. D'où la conclusion que la vie et la mort de Christ
étaient toutes deux nécessaires pour justifier l'homme pécheur. Mais
la performance parfaite de notre Sauveur n'a jamais été souillée par
la nature humaine pécheresse qu'Il a assumée. L'Écriture nous apprend
que Christ « a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre
de péché » (
He 4 :15 ).
Jacques définit nos tentations comme suit : « Mais chacun est tenté
quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise (c'est-à-dire
la chair) » (
Jc 1 :14
). Or, tandis que nous avons de notre côté succombé à la tentation,
Christ n'y a, pour Sa part, jamais consenti, de sorte que le péché
n'a jamais régné dans Son esprit, même par une seule pensée. Selon
l'opinion du spécialiste en grec néo-testamentaire K. Wuest, « Les
mots 'sans péché' (
He 4 :15
) signifient que la tentation n'a jamais donné lieu au péché
dans le cas de notre Seigneur. » (Hebrews in the Greek New Testament,
p. 95). Christ a ainsi démontré un caractère parfaitement immaculé
dans notre nature pécheresse corporative qu'Il a assumée. Il a de
cette manière satisfait pleinement aux strictes exigences de la loi
en qualité de substitut. Cela Lui a permis de Se qualifier pour être
l'Agneau de Dieu sans tache.
Cependant ce même Christ a, sur la croix et en tant qu'Agneau de
Dieu, ôté le péché du monde (
Jn 1 :29
). Comment Christ pouvait-Il ôter « le péché » du monde (remarquez
le singulier) si ce dernier n'était pas présent dans la chair qu'Il
a assumée? Ou, en d'autres termes, comment Christ pouvait-Il
condamner « le péché dans la chair » (
Rm 8 :3
) dans une chair non pécheresse?
Mais Christ a enlevé notre péché en le condamnant sur la croix. Il
n'a pu le faire qu'en assumant notre chair où habitait déjà le péché (
Rm 7 :17-20 ). Dans
Hébreux 9 :26,
nous lisons : « Il (Christ) a paru pour ôter le péché
par son propre sacrifice. » Selon Wuest, l'enlèvement du péché
concerne aussi bien la nature pécheresse que les actes de péché :
« Le verbe 'ôter' (« thétos ») signifie 'se débarrasser d'une chose
décrétée, prescrite, établie.' Par la désobéissance d'Adam, le péché
s'était lui-même installé dans la race humaine sous forme d'une nature
pécheresse et d'actions pécheresses » (ibid., p. 40, nous
soulignons).
Puisque Christ a pris part à notre nature humaine pécheresse et a
triomphé d'elle, Il est aujourd'hui capable, en tant que Grand-Prêtre
de notre race, de « compatir à nos faiblesses » ou à nos
« infirmités » (
He 4 :15
) et également de « secourir ceux qui sont tentés » (
He 2 :18
). Le mot « infirmités » ne doit pas être limité aux faiblesses
physiques telles que la fatigue ou le vieillissement comme certains
l'enseignent. Toujours selon Wuest, « Le mot 'infirmités' est
'astheneia', 'faiblesse morale qui rend les hommes capables de
pécher', autrement dit, une nature totalement dépravée. » Citant
l'expression : « La faiblesse est aussi son partage (l'encercle) » (
He 5 :2
), Wuest l'interprète ainsi : « Le Grand-Prêtre a des
infirmités, des tendances pécheresses, qui l'assiègent. C'est-à-dire
qu'Il est complètement cerné par le péché, étant doté d'une nature
pécheresse qui contrôlera tout son être si elle n'est pas
réprimée » (ibid., p. 98).
- Dans le même ordre d'idées, il est intéressant de noter
l'observation de Karl Barth : « Ceux qui croient que le Christ a
assumé la nature humaine déchue ont encore plus raison que les
auteurs du catéchisme de Heidelberg de considérer l'ensemble de
la vie terrestre de Christ comme pourvu d'une signification
rédemptrice; car, selon ce point de vue, la vie de Christ
précédant Son ministère terrestre et Sa mort ne fut pas
simplement un retour en arrière à la position qu'occupait Adam
avant de céder à la tentation, mais plutôt l'adoption de notre
point de départ, avec toutes les tendances mauvaises dont nous
héritons, utilisant le matériau peu prometteur et inadéquat de
notre nature humaine corrompue afin de réaliser une obéissance
parfaite et sans péché » (ICC, p. 383).
Nous pouvons ainsi être assurés par cette vérité que notre rédemption
réalisée par la sainte histoire de Christ a été à la fois parfaite et
complète. Non seulement possédons-nous dans la justice de Christ
« la justification qui donne la vie » (
Rm 5 :18
), mais nous pouvons aussi réclamer en Lui la délivrance de notre
esclavage du péché et maintenant « vivre pour Dieu » (
Rm 6 :7-13
). Voilà la base de la véritable justification comme de la
sanctification, que nous ne pouvons recevoir l'une et l'autre que par
la foi seulement.
2. Les déclarations suivantes de l'Écriture prouvent-elles que
la nature humaine de Christ était non pécheresse : « cette chose
sainte », « sans péché », « séparé(e) des pécheurs » (
Lc 1 :35;
He 4 :15;
7 :26 )?
Afin de bien interpréter ces citations, nous devons aussi tenir
compte des autres textes qui reconnaissent Christ comme portant
notre condition humaine pécheresse. Car il ne peut y avoir ici deux
points de vue opposés. Dieu « l'a fait devenir péché pour nous » (
2 Co 5 :21
); Dieu L'a envoyé « dans une chair semblable à celle du péché » (
Rm 8 :3
); « il convenait qu'il soit rendu semblable à ses frères en toutes
choses » (
He 2 :17
); Christ « a pris (sur Lui) nos infirmités » (
Mt 8 :17
), etc.
Ceux qui essaient de concilier ces deux points de vue apparemment
opposés en enseignant que le Christ a pris notre nature pécheresse au
niveau physique seulement, devenant sujet à la fatigue, au
vieillissement, etc., et qui insistent sur le fait qu'Il aurait pris
la nature non pécheresse d'Adam avant la chute au niveau moral ou
spirituel, vont plus loin que les Écritures. Une telle interprétation
ne peut pas être soutenue par une exégèse honnête de ces textes. En
outre, nous constatons dans les Écritures que nos natures physique et
spirituelle sont tellement dépendantes l'une de l'autre que si l'une
est pécheresse, l'autre l'est aussi. Ainsi ce corps « corruptible »
est décrit comme « mortel », et « l'incorruptibilité » comme
« l'immortalité » (
1 Co 15 :53
). De même, « le corps du péché » (
Rm 6 :6
) est appelé le « corps de cette mort » (
7 :24 ).
Notre idée est qu'une véritable harmonisation de ces deux groupes de
textes apparemment contraires ne peut avoir lieu que si nous prenons
en considération deux faits importants.
Premièrement, Christ était à la fois Dieu et homme de sorte qu'Il
avait deux natures distinctes unies en une seule personne, Sa propre
nature divine qui était immaculée et notre nature humaine pécheresse
et corporative qu'Il a assumée. Christ fait donc figure de paradoxe.
D'un côté, Il pouvait être appelé « cette chose sainte » et d'un
autre côté, Il a été « fait péché. »
Deuxièmement, bien que Christ ait pris sur Lui notre nature
pécheresse, elle ne doit pas être considérée comme l'équivalent de
notre nature humaine « familiarisée » avec le péché. Notre nature
pécheresse a connu et connaît le péché, mais Sa nature humaine n'a
pas connu le péché, de sorte que Son humanité peut être décrite, au
niveau performance, comme sans péché. Selon l'Écriture, Christ
comprend notre faiblesse parce qu'Il a pris notre nature pécheresse
dominée par « la loi du péché. » Néanmoins, Son esprit n'a jamais
consenti à pécher en aucune occasion, si bien que Sa chair était
totalement dépourvue de péché (
1 P 4 :1 ).
Ayant saisi ces deux points importants, à savoir l'état immaculé de
la divinité de Christ et l'état parfaitement immaculé (non pécheur)
de Son caractère réalisé dans Son humanité, le problème de concilier
ces deux groupes de textes apparemment contradictoires se dissipe
aussitôt. Il est clair que les textes qui se réfèrent à la nature
non pécheresse de Christ se rapportent soit à Sa nature divine non
pécheresse, soit à Sa vie et à Son caractère sans péché; tandis que
les textes qui relient Christ à notre condition pécheresse se
réfèrent à Son « équipement », notre nature humaine pécheresse
« vendue au péché » qu'Il a assumée (
Rm 7 :14 ).
Avec ces choses à l'esprit, examinons maintenant les textes clefs
qui ont trait à l'état non pécheur de Christ et voyons comment ils
se réfèrent soit à Sa nature divine non pécheresse, soit à Sa vie
parfaite et sans péché dans notre chair pécheresse.
Luc 1 :35
: « Cette chose sainte. » Cette phrase est employée en rapport avec
l'appellation de « Fils de Dieu. » Par conséquent, c'était à Sa
divinité que l'ange faisait allusion, une divinité sainte et non
pécheresse qui constituait l'essence de Son Être.
Jean 8 :46
: « Qui d'entre vous me convaincra de péché? » Jésus posa cette
question en S'adressant aux Juifs, incapables de distinguer Sa nature
divine et d'apprécier Son caractère parfait. Il faisait référence à
Sa vie sans péché.
Jean 14 :30
: « Le prince de ce monde vient et il n'a rien en moi. » L'objectif
de Satan a toujours été de faire échouer le plan du salut en amenant
Christ à pécher. Les tentations au désert en sont un bon exemple.
Mais toutes ses tentatives ont échoué, comme nous le confirme
Hébreux 4 :15.
C'est à cette victoire que Christ faisait allusion. Jésus explique
Lui-même le passage au verset suivant : « J'agis selon l'ordre que le
Père m'a donné » (verset 31). Il s'agit bien ici d'une justice
parfaite!
Hébreux 7 :26
: « Séparé des pécheurs. » Cette expression est précédée des mots
« saint », « innocent », « sans tache », qui font tous référence à la
performance parfaite réalisée par Christ, Sa justice. C'est dans Sa
vie sans péché et non dans la nature qu'Il a prise que Christ a été
différent et distinct de la race humaine pécheresse qu'Il était venu
racheter. « Tu as aimé la justice, et tu as haï l'iniquité. C'est
pourquoi, ô Dieu, ton Dieu t'a oint d'une huile de joie au-dessus de
tes semblables » (
He 1 :9
). C'est dans ce caractère que nous découvrons Sa justice!
2 Cor. 5 :21
: « Celui qui n'a point connu le péché. » Cette affirmation a été
faite dans le contexte de Sa fonction de porteur du péché. Christ
n'a pas connu le péché en ce qui a trait à Sa nature divine, Son
caractère et Sa performance. Cependant, Il « a porté nos péchés en
son propre corps » (
1 P 2 :24
). Il l'a fait en portant notre humanité pécheresse pendant toute Sa
vie, de la naissance à la mort. C'est pourquoi Paul a pu dire :
« Celui qui n'a point connu le péché, Il (Dieu) l'a fait devenir
péché pour nous. »
1 Jean 3 :5
: « Il n'y a point en lui de péché. » La phrase précédente se lit
ainsi : « Or, vous le savez, Jésus a paru pour ôter les péchés. » Le
contexte de ces paroles de Jean (versets 4 et 6) indique que le
« péché » représente ici les « actes de péché » et non la nature
assumée par Christ.
Hébreux 9 :14
: « Christ... s'est offert lui-même sans tache. » Cette expression de
même que celle qui suit, « purifiera-t-il votre conscience des
oeuvres mortes », suggèrent toutes deux l'accomplissement d'une vie
parfaite plutôt qu'une nature parfaite. Il a été « sans péché », bien
qu'Il ait été « tenté comme nous le sommes » (voir
1 P 1 :19 et
He 5 :8, 9 ).
Ainsi, aucun de ces textes ne fait allusion à la nature humaine de
Christ comme telle, et ils ne peuvent être utilisés pour prouver que
Sa nature humaine était non pécheresse et semblable à celle d'Adam
avant la chute. Lorsque ces textes sont correctement juxtaposés, ils
nous apprennent que l'état non pécheur de Christ se rapportait à Son
caractère ou à Sa vie, réalisés dans une nature humaine identique à
celle qu'Il était venu sauver. Il « a condamné le péché » dans la
nature dominée par le principe du péché, c'est-à-dire l'amour de soi.
Il en découle que la justice de Dieu manifestée dans la chair
pécheresse peut vraiment être décrite comme « le mystère de la
piété : Dieu manifesté dans la chair » (
1 Tm 3 :16 ).
3. Christ aurait-Il pu résister à la tentation si la nature
humaine qu'Il a assumée avait reçu la même hérédité que la nôtre,
avait en quelque sorte été dominée par la « loi du péché »?
Dans
Romains 2 et
3,
Paul démontre que « tous... sont sous l'empire du péché » et qu'il
n'y a « point de juste, pas même un seul. » Par conséquent, lorsque
nous considérons la nature humaine pécheresse, « il n'en est aucun
qui fasse le bien » (
Rm 3 :9-12
). Cependant l'apôtre nous informe aussi que ce que l'homme pécheur
ne peut pas faire en lui-même et de lui-même (
Rm 7 :14-24
) et ce que la loi ne pouvait pas faire à cause de la faiblesse de
la nature humaine (
Rm 8 :3
), Dieu l'a fait! Il l'a fait dans la nature humaine de Christ,
semblable en tous points à notre nature humaine pécheresse. Et
Il l'a fait afin que les justes exigences de la loi soient accomplies
en nous qui choisissons d'imiter Christ et de marcher selon l'Esprit (
Rm 8 :3-4 ).
La vie sans péché de Christ n'a pas prouvé que l'homme pécheur peut
en lui-même et de lui-même résister à la tentation sans jamais être
atteint par le péché. Ce que Sa vie a plutôt démontré, c'est que
l'homme pécheur, habité et dirigé par l'Esprit de Dieu, peut surmonter
toute la puissance que le diable exerce sur la chair pécheresse.
C'est ce nous enseigne le Nouveau Testament. Se décrivant Lui-même
comme un homme, Christ a bien expliqué qu'Il ne pouvait rien faire de Lui-même (
Jn 5 :19-30
) et qu'Il vivait « par le Père ». (
Jn 6 :57
). Ses oeuvres elles-mêmes procédaient toutes du Père (
Jn 14 :10-11
). Après avoir fait le récit des tentations de Christ dans le désert,
Luc conclut : « Jésus, revêtu de la puissance de l'Esprit, retourna en Galilée » (
Lc 4 :14
). Parlant de Sa mort, l'auteur de l'épître aux Hébreux nous dit
que « par la grâce de Dieu », Christ « a souffert
la mort pour chaque homme » (
He 2 :9 ).
C'est seulement dans ce contexte que Christ a pu résister à toutes
les tentations et donner au croyant né de nouveau la capacité de
dominer le péché. « ... par lesquelles nous sont données d'excessivement
grandes et précieuses promesses (c'est-à-dire en Christ), afin que
par elles vous puissiez participer à la nature divine, ayant échappé
à la corruption qui règne dans le monde par la convoitise » (
2 P 1 :4
).
Alors que Paul affirme clairement que l'homme en lui-même et de lui-même
ne peut résister à la tentation, il déclare avec non moins de clarté
que ce qui est impossible à l'homme est possible à Dieu. « Marchez
selon l'Esprit, et vous n'accomplirez pas les désirs de la chair » (
Ga 5 :16
). « Mais revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ, et n'ayez pas soin
de la chair pour en satisfaire les convoitises » (
Rm 13 :14 ).
À la lumière de cette vérité, si quelqu'un ose prétendre que l'humanité
pécheresse ne peut pas résister à la tentation ni dominer le péché
en marchant selon l'Esprit, c'est qu'il considère la puissance du
diable et du péché comme supérieure à la puissance divine. « La loi de
l'Esprit de vie en Jésus-Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort » (
Rm 8 :2
). « Celui qui a ressuscité Christ d'entre les morts rendra aussi
la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous » (
Rm 8 :11
). Voilà la glorieuse vérité de l'évangile qui doit communiquer
une espérance éternelle à tout croyant vivant dans ce monde de péché!
4. Si Christ est le « second Adam », n'est-ce pas parce
qu'Il a pris la nature non pécheresse du premier Adam avant sa chute?
Une telle conclusion n'est pas scripturaire. Même s'il est exact que
Christ est le « dernier Adam » (
1 Co 15 :45
), les textes montrent également dans quel sens Christ doit être
comparé à Adam. Aller au-delà du sens attribué, c'est prendre
une initiative contraire à la Parole de Dieu. Dans
Romains 5 :12-21
, Adam et Christ sont d'abord comparés puis mis en contraste.
La lecture du passage décrit clairement en quoi consiste le parallèle
qui existe entre Christ et Adam. Il ne porte pas sur leur nature,
mais sur leur fonction de représentant de la race humaine. De même
que tous les hommes étaient présents dans le premier Adam lorsque,
par son péché représentatif, il a ruiné sa postérité, ainsi Dieu
a réuni tous les hommes en Christ, Le qualifiant pour être le
second ou le « dernier Adam » (
1 Co 1 :30;
Ep 1 :3
). Et en vertu de Son obéissance, tous les hommes ont été
légalement justifiés en Lui pour la vie (
Rm 5 :18 ).
C'est uniquement dans ce sens que l'Écriture établit une
comparaison entre Adam et Christ. Comme l'acte d'Adam a
affecté la race humaine en entier, de même l'acte de Christ
a affecté toute l'humanité (
Rm 5 :15, 18
). Vouloir pousser la comparaison plus loin et assimiler
la nature humaine de Christ à la nature non pécheresse
d'Adam avant la chute, c'est ajouter aux Écritures.
Nous ne trouvons nulle part dans la Bible une quelconque
comparaison entre Adam et Christ au niveau de leur
« nature ». Au contraire, Christ en tant que « Fils
de l'homme » est appelé Fils de David et d'Abraham (
Mt 1 :1
), sachant que tous deux possédaient une chair pécheresse;
Il est aussi dépeint comme « devenant (fait) semblable aux hommes » (
Ph 2 :7
); et encore « il a dû être rendu semblable en toutes
choses à ses frères » (
He 2 :17
). Il est donc clair que nous ne pouvons pas dire que
Christ a, en S'incarnant, pris la nature non pécheresse d'Adam
en nous basant simplement sur le fait qu'Il a été appelé « le second Adam ».
Pour conclure cette section sur les objections, il est important de nous
rappeler que toute tentative de préserver l'état parfaitement immaculé
de Christ au détriment de la pleine signification et de la puissance
de l'évangile ne peut que miner à la base la vérité de l'évangile.
Ceux qui enseignent que Christ a assumé la nature d'Adam avant la
chute doivent absolument enseigner qu'Il n'a pas eu à lutter contre
la puissance du péché présent dans la chair pécheresse; mais un tel
enseignement détruit une vérité vitale de l'évangile. L'évangile n'offre
pas seulement une justification légale à l'homme pécheur, mais aussi la
puissance divine capable de le délivrer du péché (
Mt 1 :21;
Rm 1 :16;
1 Co 1 :17, 18, 24 ).
Afin de pouvoir pleinement apprécier ce salut, nous devons comprendre
le péché dans le contexte de la grande controverse entre Christ
et Satan. Au coeur de cette controverse se trouve le conflit qui
oppose la loi de Dieu fondée sur le principe de l'amour-agapè qui
« ne cherche point son intérêt » (
1 Co 13 :5;
Mt 22 :36-40
) et la loi du péché fondée sur le principe de l'amour de soi (
Es 53 :6;
Ph 2 :21
). Ces deux principes opposés se sont rencontrés et combattus
dans l'humanité de Christ. D'une part Satan, oeuvrant au travers
de la chair de Christ, a désespérément tenté de séduire Son
esprit pour l'amener à exercer Sa propre volonté, tandis que
d'autre part, le Saint-Esprit, agissant dans la pensée de Christ,
n'a jamais capitulé. Toutes les tentatives de Satan ont finalement
échoué, la réponse de Christ demeurant toujours : « Non pas ma
volonté, mais que Ta volonté soit faite » (
Jn 4 :34;
5 :30;
Mt 26 :39 ).
Cette bataille, commencée au moment où Christ atteignait l'âge de
faire Ses propres choix, s'est poursuivie jusqu'à la croix alors
que Satan, utilisant la pleine force des tentations que pouvait
produire la chair pécheresse, suggéra à Christ de descendre de
la croix et de Se sauver Lui-même (
Lc 23 :35-37
). Mais lorsque Christ refusa de céder et fut obéissant « même jusqu'à la mort » (
Ph 2 :8
), le royaume de Satan et son principe de l'amour de soi furent
totalement vaincus pour toujours (
Jn 12 :31;
Rm 8 :2-3
). Cette victoire est une partie vitale de la bonne nouvelle
de l'évangile : « Prenez courage, j'ai vaincu le monde » (
Jn 16 :33
; pour la définition du mot « monde », voir
1 Jn 2 :16;
5 :4 ).
Maintenant il se peut que certains parmi ceux qui prônent la théorie
de la nature non pécheresse de Christ diront que Christ n'avait pas
besoin de prendre notre nature pécheresse pour être tenté. Même si
cela est vrai puisque Adam a déjà prouvé que la nature humaine non
pécheresse peut être tentée et pécher; ce n'est pas la question qui
nous importe dans les tentations de Christ. C'est une erreur de
comparer et d'assimiler la tentation d'Adam et sa chute à nos
tentations et nos échecs. Quand Adam a péché en Éden, il a alors
commis un acte non naturel, car son péché était en contradiction
avec sa nature non pécheresse. En d'autres mots, son acte de
désobéissance, ce « non » adressé à Dieu, était inexcusable et
par conséquent inexplicable. Au contraire, quand l'homme pécheur
et déchu cède à la tentation et aux péchés, il fait là quelque
chose de parfaitement naturel et conforme à sa nature pécheresse.
Ceux qui enseignent qu'une personne n'a pas besoin d'une nature
pécheresse pour être tentée et que la nature non pécheresse de
Christ pouvait être tentée et était donc susceptible de tomber font
peut-être une affirmation correcte en soi. Mais les Écritures
établissent clairement que Christ « a été tenté comme nous en toutes choses » (
He 4 : 15
). Cela signifie que Christ a dû être tenté comme nous, au
travers de Sa chair, puisque la tentation de l'homme déchu est
définie comme suit : « Mais chacun est tenté quand il est attiré
et amorcé par sa propre convoitise » (
Jc 1 :14
).
L'enjeu réel de la vie terrestre de Christ n'était pas qu'Il ait
pu être tenté ou qu'il ait été possible pour Lui de tomber à
l'instar d'Adam; l'enjeu était plutôt : Christ pouvait-Il résister
à Satan et vaincre la tentation, le principe de l'exaltation du
moi, dans Sa nature humaine pécheresse? Car le vrai problème de
l'homme n'est pas simplement de naître avec certaines tendances
pécheresses, mais (comme Christ l'a déclaré Lui-même) d'être,
en tant que pécheur, captif et esclave du péché et du diable (
Jn 8 :34;
Rm 3 :9;
6 :16;
7 :14;
Ac 8 :23;
2 P 2 :19;
1 Jn 3 :6-8
). Or, ce n'était pas le cas d'Adam ou de sa nature avant la
chute. Il en découle que la tentation et la chute d'Adam en
Éden ne doivent jamais être comparées avec nos tentations et
nos échecs. Dans son état immaculé, Adam n'avait pas à renoncer
constamment à lui-même ou à crucifier son « moi ». Mais Christ
a dû porter la croix pendant toute Sa vie et y crucifier Son moi (
Lc 9 :23 ).
Il est vrai que l'enjeu fondamental reste le même dans chaque
tentation, car la tentation de pécher consiste simplement à
l'amener à dire « non » à Dieu et à vivre indépendamment de
Lui, en suivant notre propre volonté au lieu du plan d'amour que
Dieu a conçu pour nous. Même s'il n'existe aucune différence
fondamentale entre la tentation d'Adam et la nôtre, il subsiste
toujours un écart immense au niveau de la lutte, de la bataille
contre la tentation elle-même. Car si le péché consiste à opposer
un « non » catégorique à Dieu et à vivre indépendamment de Lui,
la définition de base de la nature pécheresse doit donc être une
inclination à l'égoïsme ou à l'indépendance vis-à-vis de Dieu. Paul
présente clairement ce fait en décrivant dans
Romains 1 :18-23
de quelle manière le problème du péché affecte la race humaine.
De par sa nature même, l'homme pécheur cherche à se glorifier et
à s'auto-suffire, et ses tendances pécheresses ne sont que les
différentes manifestations de l'amour de soi. C'est en fait la
signification de base du mot hébreu que l'on traduit par « iniquité » (voir
Ps 51 :5;
Es 53 :6 ).
Mais ce n'était pas le cas pour Adam au sortir de la création.
Cela revient à dire qu'Adam fut tenté de pécher dans une nature
dominée par la sainteté, rendant ainsi sa faute inexcusable.
Notre cas est différent puisque Satan nous tente dans une nature
déjà dominée par la « loi du péché » (l'amour de soi), une nature
qui cherche constamment sa propre voie (
Es 53 :6;
Ph 2 :21
). La chair sainte et non pécheresse d'Adam était soumise à la loi
de Dieu et s'en réjouissait, alors que notre nature charnelle
« n'est pas soumise à la loi de Dieu et ne le peut même pas »
d'elle-même et en elle-même (
Rm 8 :7
). Il existait une harmonie, une unité et une entente parfaites
entre la nature non pécheresse d'Adam et l'Esprit de Dieu qui
l'habitait; tandis que l'Esprit et la chair sont constamment en
guerre dans le cas du croyant né de nouveau (
Ga 5 :17 ).
Il n'était pas naturel pour Adam de pécher et c'était pour lui
une chose extrêmement difficile à faire; par ailleurs, le péché
plaît à la nature pécheresse de l'homme pécheur et il est chez lui
tout à fait naturel (ainsi le ressent-il!) (
Rm 7 :14-23
). Adam pouvait être justifié en gardant la loi; mais dans notre
cas, « nulle chair ne sera justifiée devant Dieu par les oeuvres de la loi » (
Rm 3 :20, 28;
Ga 2 :16
). Le péché d'Adam ne peut pas être expliqué car il constitue
« le mystère de l'iniquité », la révélation du pouvoir du diable;
il n'en est pas ainsi pour nous car en se manifestant dans la
chair pécheresse, la justice de Dieu révèle Son pouvoir sur le
péché et le diable, ce qu'on appelle « le mystère de la piété »,
d'abord visible en Christ, et maintenant disponible pour nous
par la foi en Lui (
1 Tm 3 :16;
Col 1 :27 ).
La grande erreur de ceux qui prétendent que Christ n'avait pas
besoin de prendre notre nature déchue pour être tenté et éprouvé
comme nous le sommes, est de considérer la situation d'Adam comme
équivalente à la nôtre. La victoire de Christ sur la tentation et
le péché a exigé beaucoup plus de Sa part qu'il n'en aurait coûté
à Adam pour triompher s'il n'y avait jamais eu de chute. C'est ce
que nous devons maintenant considérer pour apprécier pleinement
Christ comme notre justice. Car lorsque nous découvrons la différence
réelle entre la tentation d'Adam dans sa nature non pécheresse d'une
part, et nos tentations dans le cadre de notre nature pécheresse
d'autre part, nous ne pouvons que conclure qu'il n'était pas possible
que Christ soit tenté comme nous le sommes en assumant une nature
spirituelle non pécheresse comme celle d'Adam avant la chute. Nos
yeux s'ouvrent alors pour nous permettre d'apprécier la grandeur du
salut accompli par Christ pour nous.
Pour le comprendre, nous devons comparer les tentations de Christ avec
celles d'Adam. Puisque Christ était à la fois Dieu et homme et qu'Il
possédait donc en Lui-même une puissance divine inhérente, se
pourrait-il que la tentation d'employer cette puissance divine
indépendamment de Son Père ait été si grande qu'elle nous force à
conclure que Ses tentations étaient très différentes et de beaucoup
supérieures à celles de l'homme, y compris celles d'Adam? Bien que ce
raisonnement puisse sembler convaincant, nous devons réaliser qu'il ne
pouvait être vrai que dans le contexte d'une nature pécheresse, et
c'est ce qu'il nous faut absolument saisir.
En supposant que Christ ait pris une nature non pécheresse et que Ses
tentations aient été supérieures aux nôtres en vertu de cette puissance
divine inhérente qui Lui était disponible sans la foi, ne devrions-nous
pas aussi conclure que la tentation d'Adam aurait aussi été plus grande
que la nôtre à cause d'une capacité pour le bien supérieure dans sa
nature non pécheresse? Dans ce cas, il nous faudrait aussi admettre
qu'il aurait été beaucoup plus facile pour Adam de pécher (par indépendance)
que cela ne l'est pour nous; une telle position rendrait certainement son
péché excusable, tout en jetant le doute sur la perfection de la création
divine.
De plus, s'il était si difficile pour Christ de maintenir Sa dépendance
de Dieu à cause de Sa propre puissance divine inhérente, ne serait-ce
pas le contraire pour nous à cause de nos faiblesses inhérentes?
Ne serait-il pas plus facile pour nous de dépendre de Dieu? Nous
devons pourtant tous confesser que vivre par la foi (i.e. dépendre
totalement de Dieu) implique un combat constant (
1 Tm 6 :12
), de même que le renoncement à soi et l'acceptation du principe de la croix (
Lc 9 :23 ).
Il est vrai qu'en tentant Christ, Satan essaya de Le persuader de
prendre les choses en main et d'agir indépendamment de Son Père.
Mais il nous faut faire cette distinction que si Christ avait assumé
une nature humaine non pécheresse, cette tentation aurait été contraire
à Sa nature, qui n'avait rien d'égoïste. Il n'aurait pas eu besoin
de renoncer à Sa propre volonté, ce qu'Il nous a pourtant affirmé devoir faire (
Jn 5 :30;
6 :38 ).
Si nous supposons d'un autre côté que Christ a pris sur Lui notre
nature pécheresse, une nature naturellement portée à faire sa propre
volonté, Satan L'aurait plutôt tenté à commettre un acte parfaitement
désirable pouvant procurer une certaine gloire à Son ego (comme descendre
de la croix). C'est ce qui fait toute la différence entre le fait d'être
tenté comme Adam (dans une nature non pécheresse) et être tenté comme
nous le sommes (dans une nature pécheresse).
Nous devons réaliser que le principe de l'amour de soi est étranger
à la nature de Dieu ou, dans la question qui nous occupe, à la nature
humaine non pécheresse qu'Il a créée. La loi de l'amour de soi tient
son origine du diable (
Es 14 :12-14
), qui en infecta la race humaine lors de la chute. Si Christ avait
eu une nature humaine non pécheresse sans tendances au péché, Il
n'aurait évidemment pas eu cet amour de soi enraciné dans Sa nature
même et contre lequel Il devait lutter, et Satan n'aurait pas pu,
par conséquent, Le tenter par le biais de Sa chair, comme il le
fait avec nous.
Mais notre Seigneur a déclaré qu'Il n'était pas venu pour faire Sa
propre volonté, mais la volonté de Son Père. Le fait que Christ, en
tant qu'homme, pouvait parler de Sa propre volonté comme pouvant
s'opposer à la volonté de Son Père, indique clairement qu'Il S'est
identifié aux hommes déchus qu'Il est venu sauver et ce, jusque dans
la tentation d'exécuter leur propre volonté. Mais Il ne pouvait le
faire qu'en assumant notre nature pécheresse. Les Évangiles montrent
que la grande bataille dans la vie de Christ a été livrée contre Sa
propre volonté, la même pierre d'achoppement à une vie sainte contre
laquelle se heurtent tous les pécheurs.
Encore une fois, si la chair de Christ avait été exempte de la
« loi du péché », c'est-à-dire de la loi de l'amour de soi, elle
n'aurait pas eu à souffrir chaque fois qu'Il refusait de céder à la
tentation. Or, nous lisons : « Il a souffert Lui-même en étant tenté » (
He 2 :18, KJV),
Il a été élevé « à la perfection par les souffrances » (
He 2 :10
), et Il a appris l'obéissance « par les choses qu'Il a souffertes » (
He 5 :8
). Christ a remporté la victoire au niveau de l'esprit, parce qu'Il
était soumis au contrôle de l'Esprit. Mais cela impliquait la souffrance
de la chair, empêchée de suivre sa propre voie et de pécher.
Voici comment Pierre a décrit cette lutte : « Ainsi donc, Christ ayant
souffert dans la chair, vous aussi armez-vous de la même pensée. Car
celui qui a souffert dans la chair en a fini avec le péché... » (
1 P 4 :1
). Ce qui était vrai de Christ doit l'être aussi de nous, parce que
la chair qu'Il a assumée était semblable à notre chair pécheresse.
Si Adam avait résisté avec succès à la tentation du diable, il n'aurait
pas été nécessaire de crucifier la chair ou la nature humaine. Mais
pour Christ comme pour le croyant, la victoire sur le péché est basée
sur le principe de la croix (
Ga 5 :24 ).
La vie sainte qu'aurait réalisée notre Seigneur dans une nature non
pécheresse comme celle d'Adam avant la chute ne peut apporter
aucun espoir ni encouragement aux croyants qui luttent avec la
tentation. Par ce mensonge qui prétend que Christ est venu sur
terre dans une chair non pécheresse, le diable a détruit dans le
coeur de millions d'hommes toute foi dans la possibilité de vivre
sans péché dans une chair pécheresse. Il a ainsi ouvert la porte à
l'antinomie (la grâce à bon marché) et détruit la puissance de
l'évangile. Il n'est pas étonnant que l'apôtre Jean condamne toute
opposition à la véritable humanité de Christ en l'attribuant à l'Antéchrist (
1 Jn 4 :1-3;
2 Jean 7 ).
Si Christ a assumé la nature non pécheresse d'Adam avant la chute,
Il ne devient un exemple que pour Adam et non pour l'homme déchu.
Dans ce cas, notre seul espoir d'une vie sainte devient
l'éradication de notre nature pécheresse (l'hérésie de la « chair
sanctifiée » ou du perfectionnisme) ou l'attente du prochain retour
de Christ, alors que ce corps corruptible héritera l'incorruptibilité.
Si cette position est vraie, toutes les exhortations de la Bible à
mener une vie sainte deviennent futiles.
Mais si l'évangile doit être justifié avant que la fin n'arrive,
la dernière génération de croyants doit restaurer la vérité telle
qu'elle est en Christ, afin que le monde puisse être éclairé de Sa gloire (
Ap 18 :1;
Col 1 :27 ).
Notre Sauveur est allé bien au-delà de qu'Adam aurait dû réaliser,
car Il a accompli la justice parfaite exigée par Dieu dans une
chair pécheresse semblable à la nôtre. C'est ici que réside
l'impeccabilité véritable de Christ, en même temps que la plénitude
et la puissance de Son évangile. Dieu a réalisé « l'impossible » en
produisant une justice parfaite dans notre chair pécheresse en
Jésus-Christ. Si nous voulons seulement nous soumettre à cette
vérité par la foi et permettre au Saint-Esprit d'habiter en nous
et de nous dominer (
2 Co 2 :16
), Il révélera alors Sa puissance dans le « corps » de Christ,
l'Église. « Car tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde;
et la victoire qui triomphe du monde, c'est notre foi » (
1 Jn 5 :4
). Cela fait aussi partie de la justification par la foi.
Ainsi, la connaissance de cette vérité, la justice de Christ
produite dans notre chair pécheresse, donne à chaque croyant
l'espérance de la gloire. Demeurons donc en Lui, en nous soumettant
totalement à Lui, pour que nous puissions nous aussi « marcher
comme Il a marché lui-même » (
1 Jn 2 :6 ).