Le mot « évangile » provient du grec autrefois utilisé en Afrique du Nord parmi les résidents d'Alexandrie. Il fut d'abord employé pour annoncer la bonne nouvelle de l'arrivée des bateaux céréaliers venant de Phénicie (aujourd'hui le Liban). Le blé apporté par ces bateaux était essentiel à la survie des habitants de l'Égypte à cette époque et ainsi, l'annonce de leur arrivée était certes une « bonne nouvelle ». Après la chute d'Adam, le père de la race humaine, Dieu avait promis au travers des patriarches et des prophètes de l'Ancien Testament de racheter l'humanité pécheresse. La naissance, la vie, la mort et la résurrection de Jésus constituent l'accomplissement de cette promesse. Dans ce contexte, le Nouveau Testament emploie le mot « évangile » pour annoncer la bonne nouvelle inconditionnelle du salut pour tous les hommes, réalisée dans la sainte histoire de notre Seigneur Jésus-Christ (Marc 16 15-16 ; Romains 1.1-4, 10.13-15). En bref, l'évangile peut être défini comme « la vérité telle qu'elle est en Jésus. »
L'apôtre Paul définit cet évangile comme étant la « justice de Dieu » (Romains 1.16-17 , 3.21). Par ces mots, il voulait dire que l'évangile est une justice conçue et planifiée par Dieu avant la fondation du monde (Éphésiens 1.4 ; Apocalypse 13.8), promise par Dieu après la chute (Genèse 3.15) et accomplie par Dieu à travers la sainte histoire de Christ (Jean 3.16-17 ; Galates 4.4-5). Autrement dit, cette justice est entièrement l'oeuvre de Dieu, sans contribution humaine d'aucune sorte (Romains 3.28 ; Galates 2.16). Dans cet évangile, Dieu a obtenu un salut total et complet pour toute l'humanité, de telle sorte qu'en Christ, la race humaine peut paraître devant Dieu et devant Sa sainte loi, comme parfaite (Colossiens 2.10 ; Romains 10.4). Ce salut délivre de trois situations fâcheuses auxquelles l'humanité pécheresse est confrontée. Ce sont :
1. La culpabilité et le châtiment du péché.
2. La puissance et l'esclavage du péché.
3. La nature et la présence du péché.
La délivrance de la première situation nous donne la justification, la délivrance de la seconde nous donne la sanctification et la délivrance de la troisième produit notre glorification. Il est important que chaque croyant réalise que bien que tous les chrétiens peuvent se réclamer de la justification comme d'un fait acquis (Romains 5.1), la sanctification est une expérience présente, progressive et continue (1 Thessaloniciens 4.27, 5.23) ; la glorification en tant qu'espérance pour le futur sera expérimentée à la seconde venue de Christ (Romains 8.24-25 ; Philippiens 3.20-21). Ces trois aspects du salut ont été accomplis et réalisés par la naissance, la vie, la mort et la résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ.
Il s'ensuit que ces trois aspects du salut sont tous offerts « en Christ » à l'humanité et ne peuvent être séparés l'un de l'autre. Ceux que Dieu a justifiés, Il les glorifiera, pourvu qu'ils ne se détournent pas de Lui par incrédulité (Romains 8.30 ; Hébreux 10.38-39). Selon ce que nous venons de dire, les trois aspects constituent la Bonne Nouvelle du salut et comme ils nous sont livrés en un seul colis, Jésus-Christ, ils sont inséparables et nous ne pouvons en choisir un sans recevoir l'autre.
En outre, tout ce que nous expérimentons en ce qui a trait à notre salut dans ce monde et dans le monde à venir est basé sur l'oeuvre déjà terminée de notre Seigneur. Ceci veut dire que le fondement de toute expérience chrétienne se trouve dans la sainte histoire de Christ. Pour cette raison, il devient vital que nous soyons enracinés dans la vérité telle qu'elle est en Jésus. Si notre connaissance de la mission terrestre de Christ est faussée, naturellement notre expérience le sera également. De la même manière, si notre connaissance de la vérité en Christ est partielle ou incomplète, il en sera de même de notre expérience. C'est pour cette raison que Jésus a enseigné : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira » (Jean 8.32-36).
Quand, par exemple, certains chrétiens de Corinthe ont nié la résurrection des croyants, Paul n'a pas eu besoin de chercher de texte pour prouver son point mais il l'a fait à partir de l'argument de la résurrection de Christ (1 Corinthiens 15.22-23). De même, Pierre réconforte les chrétiens qui souffrent par ce conseil : « Réjouissez-vous, au contraire, de la part que vous avez aux souffrances de Christ, afin que vous soyez aussi dans la joie et dans l'allégresse lorsque sa gloire apparaîtra » (l Pierre 4.13).
Par le moyen de la foi, le chrétien s'identifie avec Christ et Christ crucifié. Cela signifie qu'à la conversion, celui qui croit subjectivement reçoit Christ et devient un avec Christ et Christ crucifié ; et la foi est l'assurance des choses qu'on espère (le salut de Dieu en Christ), la substance de ce que nous n'avons pas encore pleinement expérimenté (Hébreux 11.1).
LES DEUX PHASES DU SALUT
Considérant ces choses, nous pouvons maintenant diviser le salut en deux phases distinctes. Premièrement, le salut est ce que Dieu a déjà accompli pour toute la race humaine par la mission terrestre de Christ (les trois aspects du salut tels que mentionnés plus haut). C'est ce salut que Christ a défini comme la bonne nouvelle de l'évangile et qu'Il a ordonné à Ses disciples de proclamer dans le monde entier (Marc 16.15). Ce salut est souvent dépeint par l'apôtre Paul comme le concept « vous en Christ » (1 Corinthiens 1.31 ; Éphésiens 1.3-6 , 2.13 ; Philippiens 3.9). Nous pouvons aussi décrire ce salut comme étant une vérité objective réalisée dans l'histoire terrestre de Christ et, donc définie théologiquement comme l'évangile objectif.
Deuxièmement, le salut est aussi identifié dans les Écritures comme ce que Dieu accomplit dans les croyants par le Saint-Esprit. Cette phase du salut n'est pas une addition à l'aspect objectif de l'évangile, mais actualise dans notre expérience ce que Dieu a déjà obtenu pour la race humaine « en Christ ». En conséquence, elle peut être décrite comme les fruits de l'évangile objectif. Elle est souvent exprimée par le concept « Christ en vous » (Romains 8.10 ; Galates 2.20 ; Éphésiens 3.17, Colossiens 1.27). Elle comprend la paix avec Dieu qui vient de la justification par la foi (Romains 5.l ; Actes l0.36 ; Colossiens 1.20), la victoire sur le péché et la sainteté de vie au travers du processus de la sanctification par la foi (Romains 6.22 ; 2 Pierre 1.5-7), et le changement de notre nature pécheresse en une nature non pécheresse au travers de la glorification qui doit se réaliser à la seconde venue de Christ (Romains 8.24-25 ; 1 Corinthiens 15.51-54 ; Philippiens 3.20-21). Puisque cette dernière phase du salut a trait à l'expérience du croyant, elle est souvent identifiée comme l'évangile subjectif.
Il existe aujourd'hui une grande confusion dans l'esprit de beaucoup de chrétiens concernant ces deux phases du salut. C'est parce que beaucoup de chrétiens n'ont pas réussi à faire la distinction entre ce que Dieu a déjà accompli en Christ il y a quelque 2 000 ans et ce qu'Il est en train de faire dans la vie des croyants par l'Esprit qui habite en eux.
Ceci a, à son tour, semé passablement de controverse sur la doctrine de la justification par la foi. Alors que Christ est notre justice dans ces deux phases du salut et que l'une et l'autre sont rendues effectives par la foi seulement, il y a certaines distinctions importantes à faire entre les deux.
La première phase du salut est souvent décrite comme étant la justice imputée de Christ et elle qualifie les croyants pour le ciel maintenant et au jour du jugement. La seconde phase du salut est décrite comme la justice impartie de Christ qui est le témoignage et la preuve que nous possédons Sa justice imputée. Elle ne contribue en rien à notre qualification pour le ciel, mais elle témoigne ou démontre ce qui est déjà vrai de nous en Christ. Une attitude indifférente ou négative par rapport à la justice impartie démontre que le pécheur n'a pas compris clairement l'évangile ou a rejeté le don de la justice imputée, c'est-à-dire qu'il refuse d'être revêtu de la justice de Christ. Ceci indique qu'il n'a pas une foi authentique et n'est donc pas converti ; il n'est donc pas prêt pour le ciel (Jacques 2.20-23 ; Matthieu 22.11-13).
Voici maintenant les quatre principales distinctions à faire entre les faits objectifs de l'évangile (vous en Christ) et l'expérience subjective du croyant qui s'est identifié par la foi avec Christ et Christ crucifié (Christ en vous).
L'ÉVANGILE OBJECTIF : « VOUS EN CHRIST »
a) Complet : nous sommes parfaits « en Christ », possédant toute justice (1 Corinthiens 6.11 ; Éphésiens 1.3 ; Colossiens 2.10).
b) Universel : toute l'humanité a été rachetée ou justifiée légalement « en Christ », c'est-à-dire réconciliée avec Dieu (Romains 5.l8 ; 2 Corinthiens 5.18-19 ; 1 Timothée 4.10 ; Tite 2.11 ; 1 Jean 2.2).
c) Extérieure à notre personne : « en Christ », la justice a été accomplie sans aucune aide ni contribution de notre part (Romains 3.21, 28 ; Philippiens 3.9). Elle est par conséquent décrite comme une justice venant de l'extérieur.
d) Méritoire : la justice « en Christ » est le seul moyen de salut pour nous et, à moins que nous lui résistions ou que nous la rejetions, elle nous qualifie pleinement pour le ciel, maintenant et lors du jugement (Actes 13.39 ; Romains 3.28 , 10.4 ; Galates 2.16 ; Éphésiens 2.8-9 ; Tite 3.5).
L'ÉVANGILE SUBJECTIF : « CHRIST EN VOUS »
a) Incomplet : « Christ en vous » est un processus continuel et progressif de sanctification qui doit être pleinement réalisé dans le comportement quotidien des chrétiens matures ; la glorification de notre corps ou de notre nature ne sera expérimentée qu'à la seconde venue (Romains 5.3-5 , 8.18-23 ; 1 Corinthiens 15.51-57 ; Philippiens 3.12-14, 20, 21 ; Colossiens 1.27 , 2.6 ; 1 Thessaloniciens 5.23-24, 2 Pierre 1.3-8). b) Individuel : « Christ en vous » s'applique seulement aux croyants qui ont, par la foi, fait l'expérience de la nouvelle naissance, c'est-à-dire dans lesquels demeure le Saint-Esprit (Jean 3.16 ; Romains 8.9-10 ; 1 Corinthiens 6.17-20 ; 2 Corinthiens 3.17-18 , 6.14-16, 1 Timothée 4.10).
c) Conjoint : « Christ en vous » implique la coopération des croyants qui, par la foi, marchent dans l'Esprit (Jean I5.1-5 , 17.23 ; Romains 8.9-14 , 13.12-14, Galates 2.20 ; 1 Jean 3.23-24).
d) Démonstratif : « Christ en vous » témoigne ou donne l'évidence de notre salut en Christ, mais n'est pas méritoire (Matthieu 5.14-l6 ; Jean 13.34-35 , 14.12 ; Éphésiens 2.10 ; Tite 3.8).
Selon la vérité objective de l'évangile, tout ce qui est nécessaire à l'homme pécheur pour être déclaré juste et être candidat pour le ciel a déjà été accompli « en Christ ». Il s'ensuit que ceux qui ont, par la foi, reçu avec plaisir leur position en Lui sont reconnus et considérés par Lui comme étant déjà justes ou justifiés, saints ou sanctifiés, et glorifiés « en Christ » (Éphésiens 1.3-6 , 2.5-6 ; 1 Corinthiens 6.9-11). « Le juste vivra par la foi » (Romains 1 17) fut la plus grande redécouverte que Luther fit depuis la disparition presque totale de l'évangile en cette période de ténèbres que fut le Moyen âge.
LE MOBILE « EN CHRIST »
Après avoir compris les faits énumérés ci-dessus, il devient évident que la seule espérance de ce monde destiné à périr repose sur la foi et l'appréciation des faits objectifs de l'évangile. De plus, comme nous l'avons déjà signalé, toute expérience chrétienne est basée sur l'oeuvre terminée de Christ de telle sorte que nous devons construire notre morale chrétienne sur les faits objectifs de la sainte histoire de Christ. Comme le décrit Paul : « Personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Christ » (1 Corinthiens 3.11-15). Considérant ceci, il n'est pas surprenant que le thème central de la théologie de Paul soit le mobile ou le concept « en Christ ».
La phrase clef contenue dans les épîtres de Paul est « en Christ » ou « en Jésus-Christ ». Si vous deviez enlever cette phrase, il ne resterait que peu de chose de l'exposé de Paul concernant l'évangile. Ce leitmotiv est souvent exprimé par d'autres phrases similaires telles que « en Lui » et « par Lui », « dans le Bien-aimé » ou « ensemble avec Lui », etc. Toutes sont des expressions synonymes faisant référence au mobile « en Christ ».
La vérité derrière cette phrase fut d'abord présentée par Christ Lui-même quand Il dit à Ses disciples : « Demeurez en moi » (Jean 15.4-6). Ces mots forment le fondement de l'évangile ; et si nous ne comprenons pas ce que le Nouveau Testament signifie par l'expression « en Christ », nous ne serons jamais capables de comprendre pleinement le message de l'évangile. Nous ne possédons rien, en tant que chrétiens, que nous n'ayons obtenu « en Christ ». Tout ce que nous avons, apprécions ou espérons comme croyants nous appartient toujours « en Christ ». En dehors de Lui, il ne nous reste que le péché, la condamnation et la mort.
Maintenant je dois admettre que cette expression « en Christ » est une phrase très difficile à comprendre. Tout comme les paroles de Christ à Nicodème « Il faut que tu naisses de nouveau » représentaient une sorte d'énigme à ses yeux, de même le concept « en Christ » est un concept très difficile à saisir pour nous. Ceci est particulièrement vrai pour nous occidentaux. Comment puis-je, en tant qu'individu, être en quelqu'un d'autre ? Pire encore, comment puis-je, moi qui suis né au XX siècle, être en Christ qui a vécu il y a presque 2 000 ans ? Ça ne fait aucun sens pour notre mode de pensée occidental.
Que veut dire l'Écriture lorsqu'elle déclare que nous étions ensemble avec Christ dans Sa mort, Son ensevelissement et Sa résurrection ? Et encore, qu'est-ce que Paul voulait dire lorsqu'il affirmait que nous sommes déjà assis « ensemble dans les lieux célestes en Jésus-Christ » (Éphésiens 2.6). Parce que nous ne pouvons imaginer ces faits, nous avons tendance à les ignorer ou à les parcourir de manière superficielle. Pourtant, il est impératif pour comprendre pleinement l'évangile que nous comprenions la signification de ces mots vitaux.
Ce motif « en Christ » est basé sur l'enseignement biblique de la solidarité ou de l'unité corporative, un concept qui est malheureusement presque totalement étranger à la pensée occidentale. Selon les enseignements clairs de la Bible, tout le genre humain se trouve étroitement lié par une vie commune et est par conséquent considéré comme une unité ou une entité corporative. C'est parce que Dieu a créé tous les hommes en un seul (Genèse 2.7 ; Actes 17.26). Le mot « vie » dans Genèse 2.7 est au pluriel dans le texte hébreu ; cela signifie que Dieu mit en Adam le souffle des vies, c'est-à-dire les vies de tous les hommes. En conséquence, quand Adam tomba, toute la race humaine tomba « en lui », puisque la chute prit place avant qu'Adam n'ait eu des enfants (Romains 5.12 ; 1 Corinthiens 15.21-22).
Cette importante vérité sera couverte de manière plus détaillée au prochain chapitre, lorsque nous étudierons les deux Adams, mais il doit être clair ici que Dieu a racheté ou justifié légalement toute la race humaine en Christ, de la même façon que Satan a causé la chute ou la condamnation de toute la race humaine en Adam (Romains 5.18).
Par une action divine, amorcée et mise à exécution par Dieu seul, la vie corporative de toute la race humaine dans sa condition déchue fut incorporée en Christ lors de Son incarnation ; par un miracle divin, la divinité de Christ et notre humanité corporative en quête de rédemption furent unies en une seule personne, Jésus-Christ (l Corinthiens l.30). C'est par ce mystère que Dieu qualifia légalement Jésus-Christ pour qu'Il devienne le second ou dernier Adam (en hébreu « l'humanité »), notre représentant et substitut. Puis, donnant pleine satisfaction par Sa vie et Sa mort aux exigences précises de la sainte loi de Dieu aussi bien qu'à Sa justice, Christ est devenu pour toujours notre Justice et notre Garant. Voilà en quelques mots ce que représente le mobile « en Christ » et ce qui constitue la bonne nouvelle de l'évangile (Éphésiens 1.3-12 , 2.4-7). C'est pour cette raison qu'il est dit que l'humanité de Christ est « tout pour nous ».
Le concept « en Christ » peut être illustré par le diagramme suivant :
condamné |
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désobéir |
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obéir |
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justifié |
à mort |
<--- |
--------- |
----- |
LOI |
----- |
------ |
---> |
pour la vie |
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Vous en Christ |
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Vie |
et |
Mort |
de |
Christ |
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Vous en Christ |
à l'incarnation |
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à la résurrection |
Tout croyant doit réaliser que la base sur laquelle Christ peut demeurer en lui par le Saint-Esprit (Romains 8.9-10) et accomplir en lui les saintes exigences de la loi (Romains 8.4) est fondée et construite sur le fait objectif qu'il a, « en Christ », déjà fait face à toutes les exigences de la loi. De là la conclusion de Paul dans son exposé sur la doctrine de la justification par la foi : « Anéantissons-nous donc la loi par la foi ? Loin de là ! Au contraire, nous confirmons la loi » (Romains 3.31 , 10.4).
LA DOCTRINE DE LA SUBSTITUTION
La vérité ci-dessus nous conduit à l'importante doctrine de la substitution. Cette doctrine fut au coeur même de la controverse théologique qui eut lieu entre les Réformateurs et les théologiens catholiques romains à l'époque de la Réforme. La question principale de cette controverse avait trait à l'aspect éthique de la vérité de la justification par la foi. La question qui fut soulevée et l'est encore aujourd'hui fut celle-ci : « Comment Dieu peut-Il justifier l'impie (c'est-à-dire le pécheur) qui croit, tout en maintenant Son intégrité face a la loi qui condamne les pécheurs ? (Romains 4.5 ; Galates 3.10).
Les théologiens catholiques insistaient sur le fait que Dieu devait d'abord rendre le croyant individuellement juste par la grâce infuse avant de pouvoir le déclarer justifié. Les Réformateurs rejetèrent cette solution légaliste et répondirent avec la doctrine de la substitution. Dieu déclare le croyant justifié sur la base de la vie et de la mort de Christ qui ont pleinement satisfait les exigences de la loi. Cette explication fut inacceptable pour les théologiens catholiques, jugée contraire à l'éthique et illégale puisqu'aucune loi ne pouvait permettre à la culpabilité, la pénalité ou la justice d'être transférées d'une personne à une autre. En conséquence, ils accusèrent les Réformateurs d'enseigner une « fiction légale », « une justice transférée » ou « une tenue de livres céleste ».
Les deux partis voyaient juste jusqu'à un certain point et cependant les deux enseignaient l'erreur. Les théologiens catholiques avaient raison sur le plan éthique de dire que Dieu devait d'abord rendre le pécheur juste avant de pouvoir légalement le déclarer juste. Ils contredisaient cependant la Bible dans leur solution et méritèrent avec raison d'être accusés de légalisme. Les Réformateurs, de leur côté, présentaient une solution correcte car la Bible enseigne clairement que les croyants pécheurs sont justifiés sur la base de la vie et de la mort de Christ (Actes 13.39 ; Romains 10.4). Ils étaient néanmoins dans l'erreur sur le plan éthique ou légal dans leur définition de la substitution, puisqu'ils ne réussirent pas à identifier pleinement l'humanité de Christ avec l'humanité corporative de la race humaine qu'Il était venu racheter. C'est un principe fondamental de toute loi, qu'elle soit divine ou humaine, qu'il est impossible de transférer la culpabilité et la punition du coupable à l'innocent (Deutéronome 24.16 ; 2 Rois 14.6 ; Ézéchiel 18.1-20). Réciproquement, il est aussi impossible de transférer légalement la justice d'une personne à une autre (Ézéchiel 18.20).
Comment pouvons-nous alors définir correctement la substitution ? Bibliquement, la doctrine de la substitution est basée sur le concept de la solidarité ou de l'unité corporative. Comme nous l'avons déjà indiqué, tous les hommes sont légalement condamnés parce que « tous ont péché » en un seul homme, Adam. De la même façon, Dieu peut légalement justifier les pécheurs parce que tous les hommes ont obéi corporativement en un seul homme, Jésus-Christ. Dieu a rendu la chose possible en unissant Son Fils avec la vie corporative de la race humaine en quête de rédemption lors de l'incarnation. Ceci a permis à Christ d'être qualifié pour devenir le second Adam et le qualifiait légalement pour être le substitut et le représentant de l'humanité déchue.
Les Réformateurs ne surent pas résoudre le problème éthique de l'évangile pour la simple raison que, comme l'Église catholique, ils faisaient une distinction entre l'humanité de Christ et l'humanité qu'Il était venu racheter. C'est seulement quand nous identifions l'humanité de Christ avec l'humanité corporative déchue de la race humaine qu'll est venu racheter, que nous sommes capables de prêcher un évanqile conforme à l'éthique, et donc une bonne nouvelle inconditionnelle.
LA NOTION BIBLIQUE D'IDENTITÉ CORPORATIVE
La pensée occidentale étant dominée par le concept individualiste, plusieurs personnes trouvent que le thème « en Christ » est un concept plutôt difficile à saisir. C'est pourquoi dans le prochain chapitre, nous verrons d'une manière plus détaillée l'enseignement biblique sur les deux Adams. Cependant, il peut être utile, avant de conclure ce chapitre et de passer au suivant, d'examiner la logique de l'épître aux Hébreux au chapitre 7, où l'auteur emploie l'idée de solidarité ou d'unité corporative pour prouver la supériorité du sacerdoce de Christ sur celui du Lévitique. Parce que Christ, en tant que Juif, est né dans la tribu de Juda, Il ne pouvait, en vertu de la loi de l'Ancien Testament, appartenir au sacerdoce lévitique. En conséquence, l'auteur des Hébreux a identifié Christ comme notre souverain sacrificateur selon l'ordre de Melchisédek (Hébreux 6.20).
Dans Hébreux 7, il prouve que Melchisédek était supérieur à Lévi. Une fois ceci établi, il n'est pas difficile de voir comment Christ, en tant que prêtre selon l'ordre de Melchisédek, possède un sacerdoce supérieur ou meilleur que le sacerdoce du Lévitique. Mais comment l'auteur des Hébreux prouve-t-il que Melchisédek est supérieur à Lévi ? En rappelant simplement à ses lecteurs que Lévi a payé la dîme à Melchisédek. L'argument est brillant : celui qui paie la dîme est toujours inférieur à celui à qui la dîme est payée. Mais Lévi n'a jamais payé la dîme à Melchisédek personnellement, car il n'était même pas né au temps de Melchisédek. Comment alors l'a-t-il fait ? « En Abraham » dit l'auteur des Hébreux.
Lévi, qui était l'arrière petit-fils d'Abraham et qui n'était pas encore né, « était dans les reins d'Abraham » lorsqu'il rencontra Melchisédek et lui donna la dîme (Hébreux 7.7-10). Cet argument est basé sur l'idée biblique de solidarité corporative et nous sera utile pour comprendre comment toute l'humanité est condamnée « en Adam » et se trouve justifiée « en Christ », puisque toute l'humanité « était dans les reins » de ces deux hommes (« en Adam » par création et « en Christ » par l'incarnation) et fut par conséquent impliquée dans leurs oeuvres respectives. Les diagrammes suivants, qui décrivent la personnalité unique de Christ, peuvent nous aider à comprendre le concept « en Christ », d'abord en nous montrant comment notre Seigneur, le Dieu-Homme, S'est qualifié à l'incarnation pour devenir notre Sauveur et, deuxièmement, ce qui s'est passé à la croix et à la résurrection quand Il a racheté l'humanité déchue.
JÉSUS-CHRIST À L'INCARNATION
Deux natures distinctes et opposées, unies en une seule Personne
Afin que Christ puisse Se qualifier légalement pour être notre substitut et notre représentant, Sa divinité a dû être unie à notre nature corporative déchue qui avait besoin d'être rachetée. C'est dans l'incarnation que ces deux natures distinctes et opposées ont été unies ensemble en une seule personne et que Christ est devenu le second Adam. C'est là le concept « en Christ », le thème central de la théologie de Paul (1 Corinthiens 1.30 ; Éphésiens 1.3-6).
SA NATURE DIVINE |
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SA NATURE HUMAINE |
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Ce qu'Il est : |
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Ce qu'Il a été fait : |
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1. Fils de Dieu (Lc 1.35) |
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1. Fils de l'homme (Lc 19.10) |
2. Existant par lui-même (Jn 1.4) |
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2. Né d'une femme (Ga 4.4) |
3. Esprit (Jn 4.24) |
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3. Selon la chair (Jn 1.14) |
4. Égal à Dieu. (Ph 2.6) |
100% divin |
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100% humain |
4. Esclave de Dieu (Ph 2.7) |
5. Sans péché (2 Co 5.21) |
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5. Péché (2 Co 5.21) |
6. Indépendant (Jn 10.18) |
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6. Dépendant (Jn 5.19, 30) |
7. Immortel (1 Tm 1.17) |
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7. Mortel (He 2.14-15) |
8. Législateur (Jc 4.12) |
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8. Sous la loi (Ga.4.4) |
JÉSUS-CHRIST À LA RÉSURRECTION
Les deux natures deviennent une, partageant la même vie divine
Sur la croix, notre vie corporative et condamnée est morte éternellement (du salaire du péché) « en Christ » (2 Corinthiens 5.14). À la résurrection, Dieu a donné à la race humaine la vie éternelle de Son Fils (1 Jean 5.11). Tout ce que nous sommes devenus par suite de la chute, Christ l'est devenu à l'incarnation, afin que par Sa vie, Sa mort et Sa résurrection, nous devenions « en Lui » tout ce qu'Il est (2 Corinthiens 5.17). Voilà la bonne nouvelle du salut !
Ainsi, nous sommes par nature :
- Spirituellement morts, mais « en Christ » avons été rendus spirituellement vivants (Éphésiens 2.5)
- Pécheurs, mais « en Christ » avons été rendus justes (2 Corinthiens 5.21)
- De nature pécheresse, mais « en Christ » avons été rendus saints et irrépréhensibles (Éphésiens 1.4)
- Condamnés, mais « en Christ » avons été justifiés (Romains 5.18)
- Fils de l'homme, mais « en Christ » avons été faits fils de Dieu (1 Jean 3.1)
- Destinés à la mort, mais « en Christ » sommes assis dans les lieux célestes (Éphésiens 2.6)
- Mortels, mais « en Christ » avons été rendus immortels (2 Timothée 1.8-10)
- Pauvres, mais « en Christ » avons été rendus riches (2 Corinthiens 8.9)
- Rien, mais « en Christ » avons été faits cohéritiers (Romains 8.17)
UN SAUVEUR
DIVINO-HUMAIN
He 2.9-12