(a1)
LES TITRES DE L'ÉVEQUE DE ROME. -- « Le pape est désigné par un
assez grand nombre de dénominations. Autrefois, lorsqu'on s'adressait
à lui, on l'appelait : Beatitudo Vestra, Magnitudo Vestra, Excellentia
Vestra, Majestas Vestra. Parmi les titres les plus usités, on compte :
Pontifex Maximus, Surnus Pontifex qui furent donnés jadis à des
évêques et à des archevêques, Sanctitas et Sanctissime Pater (Sa
Sainteté, Très Saint Père). Quant au titre de Vicaire de Jésus-Christ,
il fut donné à l'évêque de Rome, puis à des évêques et à des rois, et
ne fut appliqué exclusivement au pape que vers le XIIIe siècle. Enfin
la célèbre formule : le Serviteur des Serviteurs de Dieu (Servus
servorum Dei) se rencontre pour la première fois dans une lettre de
saint Augustin. Grégoire Ier l'adopta parmi ses titres; toutefois elle
ne devint d'une application générale qu'à partir d'innocent III, et,
vers le milieu du XVe siècle, elle fut exclusivement réservée pour les
bulles. » (P. Larousse, Dictionnaire Universel, art. « Papauté », vol.
XII, p. 137.)
« Depuis Innocent III les papes, non contents de se faire appeler
successeurs ou vicaires de saint Pierre, ou comme Grégoire VII de
s'identifier avec cet apôtre, prennent le titre de 'vicaires de
Christ' ou 'vicaires de Dieu'. 'Ce que fait le pape dans l'Église, dit
Innocent, ce n'est pas un homme qui le fait, mais Dieu lui-même par
son vicaire' et cela, disent ses commentateurs, en vertu d'un coeleste
arbitrium par lequel il peut changer la nature des choses, intervertir
le droit, sans avoir à alléguer d'autre raison que sa
volonté. 'Personne, dit le moine Augustin Triumphus, ne peut en
appeler du pape à Dieu, attendu que sa sentence est celle de Dieu même
(unum consisttirium et ipsius papae et ipsius Dei). Aussi bien que le
Christ, il est l'époux de l'Église; il juge tout le monde et ne peut
être jugé par personne.' Enfin le canoniste Zizelin ne craint pas de
l'appeler Dominum Deum nostrum papam, et le poète normand Geoffroy de
Visinaut de déclarer que Dieu, en créant le monde, en a divisé le
gouvernement en deux parts, le ciel pour lui, la terre pour Innocent
III. » (Histoire du Christianisme depuis son origine jusqu'à nos
jours, par Etienne Chastel, tome III, p. 188, 189, Paris, Fischbacher,
1385.)
(a2)
LE CULTE DES IMAGES. -- « Le culte des premières communautés
Chrétiennes, dérivant immédiatement quant à ses formes de celui des
synagogues, était naturellement sans images. Les chrétiens des
premiers siècles raillaient volontiers les païens de la vénération
superstitieuse qu'ils manifestaient pour les représentations visibles
de leurs dieux. C'est un des thèmes favoris des apologistes. Les
défenseurs de la vieille religion en appelaient exactement à la même
distinction que les catholiques d'aujourd'hui entre l'image elle-même
et celui dont elle évoquait la pensée sans parvenir, plus qu'eux, à
détruire l'objection tirée de la pratique (Lactance, Instit. div., II,
2)...
» Cependant, à partir du cinquième siècle et de l'entrée en masse des
païens dans l'Église, cette première sévérité se relâcha
graduellement. Bientôt les saintes images furent l'objet d'une
vénération qui dégénéra vite en idolâtrie. Quelques évêques
s'efforcèrent de réprimer cet abus...
» Mais le siège romain fut toujours enclin à favoriser plutôt ce genre
de dévotion qu'à le restreindre, bien que Grégoire le Grand maintînt
encore avec fermeté l'interdiction de toute adoration proprement dite
des images faites par les hommes. Cela ne put empêcher la multitude de
se laisser entraîner sur cette pente glissante... L'Orient fut le
théâtre de la première tentative de réforme... Ceux qui voulurent la
réaliser cherchèrent à laver l'Église chrétienne du reproche peut-être
le plus apparent que lui faisaient les musulmans en l'accusant
d'idolâtrie...
» En 754 Constantin Copronyme [empereur d'Orient] convoqua un concile
oecuménique à Constantinople. Aucun des patriarches n'y assista, mais
338 évêques réunis dans cette ville déclarèrent que Satan seul avait
pu réintroduire le culte des (images et des) créatures... Le culte
des images était contraire, ajoutaient-ils, à la sainte Écriture
(
Jean 4.24;
1.18;
20.29;
Deutéronome 5.8, 9;
Romains 1.23;
2 Corinthiens 5.17;
Romains 10.17)
et condamné par les Pères. Les
partisans de l'opinion opposé furent anathématisés, et tout le clergé
dut souscrire le décret... LE PAPE ÉTIENNE III REPOUSSA LE DÉCRET DE
754, et, en 769, son successeur ÉTIENNE IV FIT CONDAMNER LES
ADVERSAIRES DES IMAGES PAR UN CONCILE DE LATRAN.... En 787 (DEUXIEME
CONCILE DE NICÉE), LE DÉCRET DE 754 FUT CONMAMNÉ, et il fut décrété
que l'on devait aux images la salutation et la vénération honorifiques
en les distinguant de l'adoration formelle, qui ne convenait qu'à
Dieu. La querelle de l'Orient eut son contrecoup en Occident... Le
concile de Francfort (794), malgré la présence du légat, repoussa à
l'unanimité les décrets élaborés à Nicée et anathématisa quiconque
rendrait aux images servitium aut adorationem [service ou adoration].
Tant que Charlemagne vécut, l'opposition à tout culte rendu aux images
se maintint dans l'empire franc et dans l'île de Bretagne, sans que la
cour de Rome osât protester autrement que par des remontrances assez
molles...
» Mais ces efforts individuels ou locaux ne purent empêcher l'invasion
graduelle du culte des images, toujours encouragé à Rome. Peu à peu se
consolidèrent les superstitions grossières dont il est la source
fatale. » (F. Lichtenberger, Encyclopédie des Sciences religieuses,
Paris, Fischbacher, 1879, tome VI, p. 486-490, art. Images [Querelle
des], par A. Réville.)
Voir Baronius, Annales Ecclésiastiques, vol. IX, p. 391-407 (édit.
d'Anvers, 1612); abbé Fleury, Histoire Ecclésiastique, vol. IX,
Bruxelles, 1721; C.-J. Hefele, Histoire des Conciles, 7 vol.
1855-1874, 2e édition, 1873 ss.)
(a3)
ÉDIT DE CONSTANTIN SUR LE DIMANCHE. -- Voici la teneur de cette
loi promulguée en date du 7 mars 321 : « Que tous les juges, les
citadins et les artisans se reposent au jour vénérable du soleil. Mais
que ceux qui habitent la campagne s'adonnent paisiblement et en toute
liberté à la culture de leurs champs, attendu que souvent aucun autre
jour n'est aussi propice pour faire les semailles ou planter les
vignes; il ne faut donc pas laisser passer le temps favorable, et
frustrer ainsi, les intentions bienveillantes du ciel. » (Code
Justinien, L. III, titre 12, loi 3. Citée en latin dans le Jour du
Seigneur, par Louis Thomas, doct. en théol., vol. II, Append. III, p.
21. Genève et Paris, 1893.)
Voir Encyclopédie des Sciences religieuses, tome III, p. 751, art. "
Dimanche "; Abbé Bergier, Dictionnaire de théologie, tome II, p. 566,
art. " Dimanche "; Mosheim, Histoire ecclésiastique, IVe siècle, par.
II, sect 5.
(a4)
DATES PROPHÉTIQUES. - Voir la page 355 et plus loin la note
relative à cette page.
(a5)
LES FAUSSES DÉCRÉTALES. -- Au nombre des principales
falsifications historiques destinées à établir la puissance papale, il
faut nommer la Donation de Constantin et les Décrétales
pseudo-isidoriennes. Dans un ouvrage intitulé : Le Pouvoir du pape sur
les souverains du Moyen Age (Paris, 1839), l'auteur, M.*** (Gosselin),
directeur du Séminaire de St. Sulpice, dit de la première : « ... On a
supposé que le pouvoir temporel du pape sur plusieurs états de
l'Europe était fondé sur la Donation de Constantin, c'est-à-dire sur
un acte solennel par lequel ce prince avait donné pour toujours au
Saint-Siège, la ville de Rome, avec l'Italie et toutes les provinces
de l'empire en Occident. Nous croyons inutile de nous arrêter ici à
l'examen de cette prétendue donation, généralement regardée comme
apocryphe par les critiques modernes, depuis la Renaissance des
lettres. »
En ce qui concerne les secondes, l'abbé Fleury, dans son Histoire
ecclésiastique (tome IX, liv. 45, par. 22, p. 445, 446, Bruxelles
1721), dit ce qui suit :
« La collection où elles se trouvent porte le nom d'Isidore Mercator,
qui paraît avoir été espagnol... Il ne dit point où il les a
trouvées. Elles étaient inconnues à Denys-le-Petit qui recueillit deux
cents ans auparavant les Décrétales des papes... D'ailleurs elles
portent des caractères visibles de fausseté. Toutes sont d'un même
style qui convient beaucoup mieux au VIIIe siècle qu'aux trois
premiers : longues et remplies de lieux communs et, comme on l'a
découvert en les examinant curieusement, remplies de divers passages
de saint Léon, de saint Grégoire et d'autres auteurs postérieurs aux
papes dont elles portent le nom. Leurs dates sont presque toutes
fausses... Cependant son artifice, tout grossier qu'il était, en
imposa à toute l'Église latine. Ses fausses Décrétales ont passé pour
vraies pendant huit cents ans; et à peine ont-elles été abandonnées
dans le dernier siècle. Il est vrai qu'il n'y a plus aujourd'hui
d'homme médiocrement instruit en ces matières, qui n'en reconnaisse la
fausseté. »
Voir Mosheim, Histoire ecclésiastique, liv. III, siècle 9, 2e partie,
chap. 2, sect 81.
« La fausseté des Décrétales attribuées aux premiers papes », dit Du
Pin, docteur de Sorbonne (Nouv. Bibl., des auteurs ecclés., p. 215,
Utrecht, 1731) « est présentement si connue qu'il ne serait pas
nécessaire d'en rien dire ». (Cité par Gaussen, Le Canon des
Écritures, vol. II, p. 169.)
Parlant « de tant de pièces apocryphes ou falsifiées » le Dictionnaire
de Théologie catholique dit : « Si au XIXe siècle encore, le faussaire
trouva des défenseurs dans Dumont et l'abbé Darras, l'unanimité des
savants, sans aucune distinction de patrie
ou de religion, proteste contre le malheureux succès de cette
déplorable fourberie. » (Art. « Les fausses Décrétales », colonnes 214
et 221. Letouzey et Ané, édit., Paris.)
(a6)
LES DICTATUS DU PAPE GRÉGOIRE VII. -- « Ainsi rien ne manquait à
la suprématie spirituelle des pontifes romains en Occident. Pouvoir
administratif universel par le moyen
des légats, pouvoirs constitutif, judiciaire, législatif suprêmes,
tous leur étaient dévolus. Nous les trouvons déjà, sinon proclamés ex
professo dans ce qu'on appelle les Dictatus Gregorii VII, dont
l'authenticité est contestée, du moins occasionnellement
revendiqués
dans les lettres de Grégoire VII et dans les différents actes de son
pontificat. » (Étienne Chastel, Histoire du Christianisme, tome III, p.
188.)
(a7)
LE PURGATOIRE. -- Voir le Dictionnaire théologique de l'abbé
Vigouroux, art. Purgatoire, et le même article dans le Dictionnaire de
théologie de l'abbé Bergier, Toulouse, 1823. Il n'était pas rare,
autrefois, en entrant dans une église catholique, d'y voir suspendu,
au-dessus d'un tronc « en faveur des âmes du Purgatoire », un tableau
terrifiant des malheureux qui s'y tordent dans les flammes.
(a8)
INDULGENCES. -- Voir l'avant-dernière note du chapitre 7.
(a9)
LA MESSE. -- Sur la doctrine de la messe, voir l'ouvrage du
cardinal Wiseman : The Real Presence of the Body and Blood of Our Lord
Jesus Christ in the Blessed Eucharist; Catholic Encyclopaedia, art. l
Eucharist, par J. Pohle, S. T. D., Breslau; Canons and Decrees of the
Council of Trent, sess. 13, chap. 1-8 (London ed. tr. by T. A.
Burkley, p. 70-79); K. R. Hagen-bath, Compendium of the History of
Doctrines, vol. 1, p. 214-223, 393-398, et vol. II, p. 88-114;
Institution de la Religion chrétienne, par Jean Calvin (nouv. Éd.,
Genève, 1888), liv. IV, chap. 18, par. 8; Abbé Bergier, Dict. de
Théol., vol. III, p. 247-283; Dict. théologique de Vigouroux, art. «
Eucharistie ».
À l'époque de la Réformation, le docteur de Sorbonne Guy Furbity,
appelé à Genève, en 1533, pour y combattre l'Évangile, déclarait : «
Un prêtre qui consacre les éléments de la Cène est au-dessus de la
Vierge, car elle n'a donné la vie à Jésus-Christ qu'une fois, tandis
que le prêtre le crée tous les jours, aussi souvent qu'il le veut...
Ah! le prêtre!... il ne faudrait pas seulement le saluer, il faudrait
s'agenouiller, se prosterner devant lui. »
On retrouve fréquemment ces mêmes affirmations dans des journaux ou
des ouvrages de piété catholiques. Au mois de décembre 1912, on
lisait, par exemple, dans le Messager du Très-Saint Sacrement (de
Montréal, Canada) sous le titre de « le Prêtre » un morceau d'où nous
détachons ces deux vers :
Des hommes revêtus de grâce surhumaine
Parlent, et Dieu soudain se fait obéissant.
(a10)
VERSIONS VAUDOISES DES ÉCRITURES. -- Voir E. Petavel, La Bible
en France, ch. 2, pr. 3, 4, 8-10, 13, 21, éd. de Paris 1864); D.
Lortsch, Histoire de la Bible en France, Paris, 1910, p. 8, 19, 101,
106; Encyclopédie des Sciences religieuses, art. « Vaudois », vol.
XII, p. 1054.
(a11)
BULLES CONTRE LES VAUDOIS. -- Une portion considérable du texte
de la Bulle papale promulguée par Innocent III, en 1487, contre les
Vaudois (bulle dont l'original se trouve à la bibliothèque de
l'Université de Cambridge) est traduite dans History of Romanism, de
Dowling, liv. VI, ch. 5, sec. 62 (éd. 1871). Voir Jean Léger, Histoire
générale des Églises vaudoises, et Chastel, Histoire du Christianisme,
vol. III, p. 476-479.
(a12)
INDULGENCES. -- Voir l'avant-dernière note du chapitre 7.
(a13)
WICLEF. -- Le texte original des bulles papales publiées contre
Wiclef, avec traduction anglaise, se trouve dans J. Foxe, Acts and
Monuments, vol. III, p. 4-13 (Pratt-Townsend, ed. London, 1870). Voir
aussi J. Lewis, Life of Wiclef, p. 49-51, 305-314 (ed. 1820); Lechler,
John Wycliffe and his English Precursors, ch. 5, sec. 2 (p. 162-164,
London ed., 1884, tr. by Lorimer); A. Neander, General History of the
Christian Church, period 6, sec. 2, part I, par. 8.
(a14)
L'INFAILLIBILITÉ PAPALE. -- Voir Catholic Encyclopedia, art. «
Infaillibility » par J. Turner, S. T. D.; P. Larousse, Dictionnaire
universel du XIX siècle, vol. art. « Infaillibilité »; Encycl. des
Sciences rel., vol. VI, art. « Infaillibilité » par A. Réville.
(a15)
INDULGENCES. -- Voir l'avant-dernière note du chapitre 7.
(a16)
LE CONCILE DE CONSTANCE. -- Voir Mosheim, Histoire
ecclésiastique, liv. III, XVe siècle, 2e partie, ch. 2, sec. 3;
L'enfant, Hist. du Concile de Constance (1714-1727); Encycl. des
Sciences rel., art. " Constance "; Abbe Fleury, Hist. Ecclés.,
Bruxelles, 1726, vol. XXI; Neander, History of the Christian religion
and Church, period 6, sec. I (1854 ed., tr. by Torrey, vol. V, p.
94-101).
(a17)
-- Dans ce chapitre et ceux qui
suivent sur
l'histoire de la Réforme, les citations non accompagnées de références
sont empruntées au bel ouvrage de Merle d'Aubigné sur la Réformation
au XVIe siècle. Fischbacher, Paris. Ne pas confondre avec l'ouvrage du
même auteur sur la Réformation au temps de Calvin.
(a18)
INDULGENCES. -- « Ce moyen de tirer de l'argent commença à être
mis en usage vers l'an 1100 par le pape Urbain II », dit Sarpi dans
son Histoire du Concile de Trente (vol. I, liv. I, p. 13-18, Oxford,
1771). Voir le vol. II, p. 745 et 766 sur les débats et décrets du
Concile de Trente à cet égard; Bergier, Dict. de Théologie, art. «
Indulgences », par W. H. Kent, O. S. C., de Bayswater, Londres;
Léopold de Ranke, Histoire de l'Allemagne au temps de la Réforme
(1839).
Le texte de l'absolution donnée par Tetzel aux acheteurs d'indulgences
est publié dans l'article : « Indulgences », au Dictionnaire universel
du XIXe siècle de P. Larousse (vol. IX), où on lit :
« Quand il [Tetzel] parlait de l'application de l'indulgence aux
défunts, il proclamait comme une vérité incontestée que l'état de
grâce n'était pas requis. Cette assertion sans nuances l'amena à
s'exprimer comme si la contribution pécunière était tout et avait une
efficacité infaillible. »
Sobald das Geld im Kasten klinkt!
Die Seele aus dem Fegfeuer springt!
À peine dans le tronc est tombée une obole
Du purgatoire une âme au paradis s'envole.
(Traduction de M. Christiani)
« Tel aurait été, au dire de Luther, l'adage favori de Tetzel, et
l'attribution parait justifiée pour le sens, sinon pour les termes
eux-mêmes. »
(a19)
L'ORDRE DES JÉSUITES. -- Voir ce mot dans le Dictionnaire
universel de P. Larousse, vol. IX, Paris, 1873. L'article (de Ch.
Sauvestre) résume l'histoire de l'ordre, cite les ouvrages d'auteurs
jésuites sur la morale de l'ordre (probabilisme) et les « Instructions
secrètes de la Société de Jésus ».
Nous donnons ci-dessous une partie de l'article consacré à cet ordre
dans le Dictionnaire d'Histoire ecclésiastique de J. A. Bost
(Fischbacher, Paris, et Beroud, Genève, 1884) :
« JÉSUITES, ordre fondé en 1534 par Ignace de Loyola, et approuvé en
1540 par Paul III. Il porte aussi le nom de Compagnie ou Société de
Jésus. S'il eut dès l'abord plusieurs objets en vue, les circonstances
l'amenèrent presque aussitôt après sa fondation à entrer en lice avec
la Réforme, et il se jeta dans la mêlée avec une hardiesse qui ne
reculait devant rien et avec un succès qui dépassa même ses
espérances... Les statuts sont calculés pour faire de chacun
l'instrument absolument passif de ses supérieurs... La théorie de
l'obéissance passive, empêchant le développement de la conscience
individuelle, a été, avec le pélagianisme qui est à la base de tout le
système, la grande inspiratrice de la morale jésuitique... [dont les
préceptes] les uns sévères, à l'usage des personnes qui prennent la
religion au sérieux, les autres, d'une indulgence effrayante pour tous
les vices, pour tous les crimes commis ou à commettre... La morale
des jésuites se caractérise encore par la direction de l'intention :
on peut voler, calomnier, tuer, pourvu qu'en le faisant on éloigne
l'intention coupable, et qu'on s'en tienne à l'intention permise, par
exemple au désir d'être riche pour pouvoir faire du bien, au désir de
sauver son honneur et peut-être sa vie. Enfin les réservations
mentales, autre système ingénieux inventé par les jésuites, consistent
dans le droit d'affirmer une chose fausse, même par serment, pourvu
que dans son for intérieur on en pense une autre qui infirme ou
modifie celle que l'on paraît affirmer. Les Provinciales de Pascal
flagellèrent ces turpitudes et portèrent aux jésuites un coup fatal et
décisif, dont ils ne se sont jamais relevés moralement. De leur côté,
les capucins et les franciscains, jaloux de leurs succès dans les
missions lointaines, dénoncèrent leur méthode d'accommodation et de
supercherie dont ils usaient pour faciliter la conversion des païens
au christianisme. Mais ce qui acheva de les perdre, ce fut leur
conduite politique...
» La guerre de Trente ans leur livra la Bohême et la Silésie. Bientôt
ils gagnèrent la Belgique et la Pologne, et, y écrasèrent le
protestantisme par la violence. La Suède seule leur ferma résolument
ses portes en 1593. Élisabeth les avait bannis d'Angleterre, ainsi que
tous les ordres religieux en 1585...
» Nous n'avons rien dit de leur enseignement au point de vue des
moeurs; la question est trop délicate; on sait seulement que plusieurs
de leurs manuels ont du être supprimés par les gouvernements, et que
celui du P. Gury en particulier renferme des questions et des réponses
qui ne peuvent pas être reproduites, même en latin. Les jésuites ont
produit, outre leurs célèbres casuistes, Mariana, Sanchez, Escobar,
des missionnaires zélés, comme Xavier; des pédagogues habiles; des
savants, comme Bolland, Sirmond, Porée; des prédicateurs éloquents,
comme Bourdaloue. Mais, chose curieuse, ils n'ont jamais réussi dans
leurs entreprises politiques, et c'est lorsque leur influence semblait
le mieux assise que leurs projets échouaient contre le réveil des
souverains ou contre le bon sens des peuples...
» En vain les gouvernements demandèrent au général, le P. Ricci,
quelques changements dans les constitutions de l'ordre; Ricci répondit
fièrement : Sint ut sunt, aut non sint (qu'ils soient ce qu'ils sont
ou qu'ils ne soient pas). Clément XIII essaya de les défendre dans sa
bulle Apostolicum, en 1765; mais après sa mort, le 19 août 1773,
Clément XIV publia sa bulle Dominus ac Redemptor Noster, qui
supprimait les jésuites et fermait leurs collèges. Tous les États
catholiques s'empressèrent de publier cette bulle. »
Cette défaite, qui venait après douze siècles d'une prospérité
extraordinaire pour la papauté, est appelée dans la prophétie sacrée (
Apoc. 13.3
) une « blessure mortelle » qui devait être « guérie ».
Elle avait duré cent treize ans.
Par un bref pontifical daté du 13 juillet 1886, Léon XIII rétablissait
les jésuites dans tous leurs privilèges. Depuis sa restauration,
l'ordre n'a cessé de grandir tant dans les pays protestants que dans
les pays catholiques où il suit et prépare la fortune et les progrès
de l'Église catholique. D'abord, en Allemagne, où la menace du
socialisme a obligé le chancelier de fer à se rapprocher du parti
catholique et de la papauté en abrogeant ses fameuses « lois de mai »
issues du Kulturkampf (1873), et en rappelant par conséquent les
ordres monastiques. Les jésuites ne devaient pas tarder à voir se
rouvrir des portes que, du reste, ils n'avaient jamais franchies. --
En Angleterre, l'influence du jésuitisme est visible dans le mouvement
ritualiste et dans de nombreuses conversions au sein de
l'aristocratie. -- Aux États-Unis, où l'immigration a donné à
l'élément catholique une puissance numérique très grande, l'influence
des ordres et notamment de la « Société de Jésus » a atteint un degré
inattendu qui tend à modifier les principes politiques de la grande
République. -- Où l'ordre jouit actuellement du plus grand crédit et
de la plus grande puissance, c'est en Belgique. -- En France, malgré
toutes les fluctuations de la politique, les jésuites ont pris des
revanches éclatantes en 1873, 1877 et depuis. -- La Suisse ne fait pas
exception à la règle.
Voir Encycl. des Sciences rel., art. « Jésuites ». Quesnel, Histoire
des religieux de la Compagnie de Jésus, 3 vol. Utrecht, 1741; René de
la Chalotais, Compte rendu des Constitutions des Jésuites, Paris 1762.
Michelet et Quinet, Des Jésuites, Paris, 1843. Crétineau-Joly,
Histoire religieuse, politique et littéraire de la Compagnie de Jésus,
5 vol., Paris, 1844-1845; A. de Saint-Priest, Histoire de la chute des
Jésuites au XVIIIe siècle, Paris, 1846. Guettee, Histoire des
Jésuites, 1858-59; Wolf, Histoire générale des Jésuites, 4 vol.,
Leipzig, 1863; Nippold, L'Ordre des Jésuites depuis sa restauration
jusqu'à l'époque actuelle, Heidelberg, 1869.
(a20)
L'INQUISITION. -- Voir sur ce trop fameux tribunal : Catholic
Encyclopaedia, art. « Inquisition », par J. Blötzer, Munich; H. C.
Lea, Histoire de l'Inquisition au Moyen Age, trad. Salomon Reinach,
Paris, 1900-1902; Llorente, Histoire critique de l'Inquisition
d'Espagne, 4 vol., Paris, 1817; Hefele, Le Cardinal Ximenès, Tubingue,
1844; Encycl. des Sciences rel., art. « Inquisition », vol. VI, p.
733-752; E. Vacandard, L'Inquisition, étude historique et critique sur
le pouvoir coercitif de l'Eglise, Paris, Bloud, 1912.
(a21)
CONSÉQUENCES LOGIQUES DE LA PERSÉCUTION EN FRANCE OU CAUSES DE LA RÉVOLUTION
FRANÇAISE. -- Plusieurs historiens jouissant d'une juste considération
font remonter les causes de la Révolution française à la
proscription de la Réforme et du peuple de la Réforme -- c'est-à-dire
de la Parole de Dieu -- par l'ensemble de la nation. Voir
Lorimer (The Protestant Church in France); Buckle (History of
the Civilisation in England), H. von Sybet (History of the French
Revolution).
Dans la littérature française, il faut citer un remarquable
morceau de « philosophie de l'histoire » par Edgar Quinet, morceau
où la douleur tourne à l'ironie, et que cet historien intitule lui-même :
Des Dragonnades à la Terreur. Nous le reproduisons
in-extenso :
« Dans la vie privée, il n'est pas juste que les fils expient
la faute des pères. C'est une idée admise par notre temps. Mais
dans la vie des peuples, cette philosophie échoue; et il est certain
que les générations sont châtiées des fautes des générations précédentes.
Voilà le seul moyen de donner une explication du règne de la Terreur.
» Comme Louis XVI a été frappé à cause de l'iniquité des
rois qui l'avaient précédé, de même les Français de tous les rangs
ont été punis en 1793 et 1794, par la Terreur, de la servillité de
leurs ancêtres. Le glaive a frappé sur tous les rangs, parce que
la servitude avait été l'oeuvre de tous. L'histoire de France se
dénoue avec fureur dans ces années d'épouvante; la colère d'en
haut tranche le noeud gordien des dix derniers siècles. De toutes les
révolutions, la Révolution française a été la plus sanglante, parce
que l'histoire de France est celle qui avait laissé s'accumuler le
plus d'iniquités. La fureur a dû être plus grande là où la patience
avait été la plus longue.
» Ce fut un avantage [!] incommensurable pour les terroristes
d'avoir pour précédents et pour modèles les déclarations
ordonnées de Louvois dans la Révocation. Sans doute, le même
esprit, qui veut que tout serve d'exemple dans notre histoire, a
préparé de loin ces admirables précédents, afin que le chemin
fût tracé à la postérité. Car les terroristes, grâce à ce plan
magnifique et tout divin [!], privilège unique de notre race, ont pu
marcher avec sûreté dans cette voie de sang. Chaque étape était
marquée d'avance. Merlin de Douai s'appuie sur Louvois, Fouquier
sur Bâville. L'ange pieux [!] de l'extermination, sans nul doute,
avait pris soin pour nous de frayer cette route. Les noyades de la
Loire ont en leurs modèles : au XVIIème siècle, un Planque proposait
que l'on noyât en mer les protestants. Avertissement à Carrier.
Villars menace de passer des populations entières au fil de l'épée;
c'est déjà le langage de Collot-d'Herbois. Montrevel invente la loi
des otages; le Directoire n'aura qu'à la faire revivre.
» Mais, avouons-le, la Terreur de 1793 ne sut pas égaler
en tout la Terreur de 1687. En cela il y eut décadence. On ne
revit pas la même patience dans les bourreaux, ni des supplices
si longs, ni des morts que Bâville faisait savourer, sous ses
yeux, pendant des journées entières. 93 n'employa pas la torture;
il ne brûla ni n'écartela ses victimes; il ne rompait pas les os
des condamnés avant de les jeter grouillants dans le bûcher.
» Véritablement, il n'est guère possible à un Français de
lire les horreurs de la Révocation de l'Édit de Nantes; elles ont
eu pour nous de trop fatales conséquences qui saignent encore.
Elles ont fait entrer dans nos coeurs le mépris des choses morales
quand elles sont aux prises avec la soldatesque. Il en est resté
une admiration indélébile pour l'oeuvre du sabre, un ricanement
interminable devant la conscience qui ose résister.
» Dragonner les esprits, sabrer les croyances, écharper les
idées, opposer l'esprit troupier à l'enthousiasme naïf, rien ne semble
plus simple. Ces corbeilles remplies de têtes et envoyées au gouverneur,
ces novateurs convaincus et brusquement réduits au
silence à coups de pistolet, ces intrépides [!] et incomparables
charges de dragons contre de petites filles de sept ans, ces héroïques
[!] soldats plus furieux que des "ours", qui se couvrent de gloire
en fusillant à bout portant, massacrant les enfants en extase,
toutes ces voix de suppliciés qui se taisent lâchement [!] sous le
bruit des tambours, ces troupeaux d'âmes livrées aux moqueries
des régiments, que tout cela est magnifique et bien fait pour établir
dans les coeurs la pure religion du sabre! Car enfin, on ne niera
pas que le sabre a fort bien converti en Poitou et en Saintonge. [!]
» Comment ces cinq cent mille hommes d'élite ont-ils pu
être arrachés à la France, sans que les pierres aient crié? Comment
un pareil silence, puis presque aussitôt un pareil oubli? Et
ce n'était pas la passion, le fanatisme qui rendirent la France si
aisément complice de ces persécutions. Ce fut obéissance au maître.
» Quand le XVIIIe siècle se leva, les supplices ne se lassèrent
pas. Les gibets marquèrent les jours. Les héros des Cévennes,
tortures, rompus vifs, puis écartelés, puis brûlés au milieu des
ricanements de la foule et laissés en pâture aux corbeaux, remplissent
d'abord la scène. Ils montrent ce qu'on pouvait encore
trouver de barbarie sous l'élégance et la frivolité de ce temps. Les
meurtres paraissent plus odieux parce qu'ils sont ordonnés sans
foi et par routine. Les juges continuent de condamner, les bourreaux
de tuer, par servilité, par complaisance.
» Au milieu de tant d'horreur, la France n'avait témoigné
ni regret ni pitié. Quelques années s'étaient passées; elle avait
tout oublié. Ces plaintes déchirantes des exilés, ces demandes de
garanties, cette dignité de l'individu, cette résistance à l'oppression,
ce sérieux du coeur, ne parurent bientôt aux Français qu'un style
de "réfugiés". Cela aida sans doute les proscrits à affermir leurs
coeurs sans regarder en arrière.
» Les persécutions que les catholiques ont fait subir aux
protestants ont corrompu les premiers. La comparaison perpétuelle,
que les intendants étaient chargés de faire entre la conviction
religieuse et les intérêts, était avilissante pour tous.
» Déjà l'exemple de la noblesse, par ses abjurations intéressées,
avait enseigné bien haut qu'il n'y a qu'une chose sérieuse
dans la vie : les biens et la fortune. [!] C'était le mot de Bâville.
» Il y eut quelque chose de plus odieux que les supplices.
Je veux dire les mépris, les brutalités, les outrages envers les
convictions. On donnait huit jours à une population pour se
convertir après cela le sabre. La légèreté, comme tyran, aidait à
la cruauté. On riait de ces âmes quand on les avait flétries. Le duc
de Noailles écrit à Louvois : "Le nombre des religionnaires dans
cette province est de 240 000. Je crois qu'à la fin du mois, tout sera
expédié." Jamais pareil cynisme dans la persécution. On ne recevait
les hommes à merci qu'après les avoir dégradés. L'athéisme
devait sortir de là; Bayle eut le mérite de l'annoncer le premier.
» Louis XIV, Louvois, Tellier [jésuite, confesseur du roi]
extirpèrent Dieu. Les missionnaires bottés déchristianisèrent les
catholiques.
» Cette histoire dégouttante de sang et de meurtre, pleine
de gibets, de roues et de galères, produisit le mépris de toute
religion, des vainqueurs comme des vaincus; le carnage continua
par habitude quand le fanatisme fut rassasié. La régence vint;
elle fit une nation athée. Mais le XVIIIe siècle continua de massacrer,
de pendre, d'étrangler, par amusement...
» Ainsi la Terreur a été le legs fatal de l'histoire de France.
» Note de l'auteur. -- J'ai déjà marqué cette tradition dans
Le Christianisme et La Révolution française, 1845, et dans la
Philosophie de l'Histoire de France, 1854. » (La Révolution,
tome II.)
C'est nous qui soulignons dans les trois derniers paragraphes.
Pour bien apprécier la justesse de ce legs fatal, il faut
savoir ce que furent les dragonnades, ce que fut la Révocation
de l'Édit de Nantes. Aussi croyons-nous utile de signaler
au lecteur le tableau d'ensemble clair, précis, poignant dans sa
simplicité, qu'en donne l'Histoire des Protestants de France,
par Charles Bost, pasteur au Havre (éd. de la Cause, Neuilly-sur-Seine,
1925, p. 79-126).
Quelques mois avant de mourir, en 1715, Louis XIV déclara
officiellement que tous les anciens protestants du royaume étaient
censés avoir abjuré. Et cependant, après tous ses « revers, voyant
la monarchie dépérir en ses mains décrépites, et sortant enfin de
son long aveuglement, il rappela à ses conseillers, laïques et
ecclésiastiques, qu'il n'avait rien fait ni décidé, en matière de religion,
que d'après leurs avis, et que ce serait à eux, à Le Tellier [son
confesseur jésuite] et aux cardinaux, à répondre devant Dieu des
erreurs qu'il avait pu commettre. » (Chastel, Histoire du Christianisme,
tome IV, page 203.)
(a22)
DATES PROPHÉTIQUES. -- Voir
Appendice a37.
(a23)
LA GUERRE À LA BIBLE AU MOYEN ÂGE. --
« Le décret de Toulouse, 1229, ... établissait le tribunal affreux
de l'inquisition contre tous les lecteurs de la Bible en langue
vulgaire. C'était un décret de feu, de sang et de dévastation.
Dans ses chapitres III, IV, V et VI, il ordonnait qu'on détruisit
entièrement jusqu'aux maisons, aux plus humbles cachettes et
même aux retraites souterraines des hommes convaincus de posséder
les Écritures, qu'on les poursuivit jusque dans leurs forêts
et les antres de Ia terre, qu'on punit même sévèrement jusqu'à
leurs receleurs. » En conséquence, l'Écriture « fut prohibée partout;
elle disparut en quelque sorte de dessus la terre, elle descendit
au sépulcre. ... Ces décrets de mort promulgués d'abord au
concile de Toulouse [furent] suivis durant 500 années d'innombrables
supplices où le sang des saints coula comme de l'eau. »
(L. Gaussen, Le Canon des Saintes Écritures, tome II, ch. VII,
sec. 5, thèse 561, et ch. XIII, sec. 2, these 641, par. 2) Voir
E. Petavel, La Bible en France, ch. II, par. 3, 8-10, 13, 21 (édition
de Paris, 1864); D. Lortsch, Histoire de la Bible en France, ch. II
et III, p. 12-44. Paris et Genève, 1910.
(a24)
UN PEUPLE ATHÉE ET LICENCIEUX EN 1793. --
Paroles de sir Walter Scott, dans sa « Vie de Napoléon Bonaparte ».
La seconde citation est tirée de Blackwood's Magazine,
numéro de novembre 1870. La troisième, au bas de la même page
est encore de Walter Scott, Ouv, cité. Comme on l'a vu à la note
pour la page 286, cette vague d'incrédulité et d'immoralité qui
submergeait tout un peuple avait des causes lointaines et bien précises.
Voici encore quelques témoignages à l'appui de cette thèse :
« La France, écrit Paul Seippel, se saigna du meilleur de
son sang et l'infusa aux nations voisines pour leur plus grand
bien. Par les lois de l'hérédité, cet affaiblissement se fera sentir sur
tout le cours de son histoire. » (Les Deux Frances)
« Depuis plus d'un siècle, a dit M. Brunetière, [les protestants]
représentaient la substance morale de la France. ... N'avoir
pas senti ce qu'il y avait de force et de vertu morale dans le
protestantisme, avoir sacrifié au règne de l'unité extérieure et
apparente la plus substantielle des réalités, n'avoir pas compris que
tout ce qu'on entreprenait contre le protestantisme, on l'accomplissait
au profit du déisme et du libertinage, voilà ce qu'on ne
saurait trop reprocher à la mémoire de Louis XIV [ou plutôt à
celle du clergé influencé par la cour de Rome]. (Cité par Bonnet-Maury, Idem.)
« Époque de démoralisation profonde et de scandaleuse
incrédulité, dit Vulliet. L'exemple était parti de France, et nulle
part le désordre moral ne se montra aussi grand. Mais la contagion
se répandit cependant dans tout l'Occident, préparant les terribles
calamités qui devaient affliger l'Europe vers la fin du XVIIIe siècle. »
« À la vue de pareils scandales, donnés par l'élite de la
société française, on se demande s'il aurait été possible que de
tels faits ne rendissent pas incrédule Ia génération qui en était
témoin. Comment les esprits généreux ne se seraient-ils pas
détournés avec dégoût d'une Église qui, tout en se respectant si
peu elle-même, maintenait à toute outrance contre les malheureux
protestants les édits persécuteurs de Louis XIV, les traquait comme
des bêtes fauves dans les déserts où ils allaient rendre à Dieu leur
culte, brûlait ou rouait leurs ministres, entassait leurs adhérents
les plus zélés sur les galères du roi, enfouissait dans les cachots
d'Aigues-Mortes de pauvres femmes prises en flagrant délit de
prière dans quelque maison isolée ou au fond des bois? » (Histoire
moderne, Préludes de la Révolution, 3e éd., p. 351, 352, 353.
G. Bridel, Lausanne)
« Rien n'est triste comme l'histoire religieuse du dix-huitième
siècle. La piété languit; la science est nulle, du moins du côté
des défenseurs du christianisme. En Angleterre et en Allemagne,
un vent desséchant souffle sur les coeurs et les esprits.
» Et cependant, les attaques de la philosophie sont plus
pressantes et toujours mieux écoutées. Il faut bien y répondre.
Le plus souvent, les répliques ne s'élèvent pas au-dessus d'un
indigeste fatras; si l'on excepte Duguet et l'abbé Guenée, les
champions de la foi ne surent montrer ni vigueur d'argumentation,
ni science solide. Il aurait fallu d'ailleurs qu'ils pussent
dégager la vérité de l'Évangile de tout ce qui la surchargeait et
la rendait haïssable, dans une Église privilégiée, opulente et
oppressive. ...
» [Le clergé de] Paris se signale par de déplorables scandales.
Trop souvent il sert une messe à laquelle il ne croit plus; il porte
à l'autel les parfums du boudoir. La race des abbés galants et
libres-penseurs est nombreuse. (L'Église et la Révolution française,
par E. de Pressensé, Paris, 1864, p. 13, 14, 15)
« La débauche avait jusqu'alors gardé certains voiles; [sous
la Régence] le cynisme des moeurs, comme celui de la pensée,
s'affiche tout haut. ... Jamais il ne s'était vu telle légèreté de
conduite ni telle licence d'esprit. » (Duruy, Histoire de France,
21e édition, tome II, p. 358)
(a25)
CRUAUTÉS COMMISES AU SIÈCLE POLl DE LOUIS XIV. --
Wylie, Hist. of Protestantism, liv. XXII, ch. 7.
Dans un discours prononcé à Paris, le 23 octobre 1885, le
pasteur Eugène Bersier fait allusion au « drame atroce qui se
reproduit sur tous les points de la France, dans ce siècle qui
s'émeut aux vers mélodieux de Racine, qui savoure les enseignements
de la morale la plus délicate, et qui vante la clémence et
la douceur de Louis. » (Quelques pages de l'Histoire des Huguenots,
par Eugene Bersier, Paris, Fischbacher, 1891, p. 120)
(a26)
GLORIFICATION DU MASSACRE DE LA SAINT-BARTHÉLÉMY. --
Cité de Henry White, The Massacre of St Bartholomew.
Faits incontestables. « La municipalité de Paris donna des
gratifications aux archers qui avaient aidé au massacre, ... aux
fossoyeurs, pour avoir enterré depuis huit jours onze cents corps
ou environ; enfin elle fit frapper des médailles pour mémoire du
jour de Saint-Barthélemy. (Dict. adm. et histor., par F. et L.
Lazare, 1855. Cite par Duruy, Hist. de France, tome II, p. 36,
note. Paris, 1876) Voir une importante bibliographie sur le sujet
dans l'Encyclopédie des Sciences religieuses, par Lichtenberger.
« La nouvelle de la tuerie de Paris fut immédiatement portée
à Rome, où le cardinal de Lorraine déclara qu'il l'avait conseillée
depuis plusieurs mois. Le pape, qui crut à une conspiration huguenote,
ordonna des actions de grâces. Il fit exécuter un tableau de
la scène et frapper une médaille commémorative. Rentré en France,
le cardinal de Lorraine, au nom du clergé du royaume, félicita
publiquement le roi de son acte; il lui remit, de la part de l'Église,
à titre de remerciements, un don d'argent considérable, avec, en
plus, 800 000 livres pour Henri d'Anjou. » (Ch. Bost, Histoire des
Protestants de France, p. 66)
(a27)
ÉCRASEZ L'INFÂME. -- Confondant --
comme aujourd'hui encore -- le pur Évangile avec la superstition et le
despotisme clérical, les incrédules de la fin du XVIIIe siècle attaquèrent
la religion chrétienne avec une violence inouïe.
« Voltaire, en parlant de Jésus-Christ et de sa religion,
disait habituellement à ses amis : "Écrasez l'infâme", et, écrivant
à d'Alembert pour l'animer contre le christianisme, il lui mandait
(lettre du 18 mai 1762) : "Il faut qu'il y ait cent mains invisibles
qui percent le monstre, et qu'il tombe enfin sous mille coups
redoublés." » (Crimes de la Révolution française, par un curé,
Paris, 1820, p. 109)
« Pendant plus de vingt ans, dit l'abbé Pagès, on entend
Voltaire crier sans répit à ses disciples "Écrasons l'infâme" ,
c'est-à-dire le christianisme, qu'il nomme aussi l'erreur, le préjugé,
le fanatisme, la superstition, le colosse, le monstre, etc.
« Ah! frère, écrivait-il au marquis d'Argens, si vous voulez
"écraser l'erreur, frère, vous êtes bien tiède!" »
« À d'Alembert, le 8 avril 1761 : "Que nul, ... n'oublie le
premier des devoirs, qui est d'anéantir l'infâme; confondez l'infâme
le plus que vous pourrez." »
« À Damilaville, le mois suivant : "Courez tous sur l'infâme
habilement. Ce qui m'intéresse, c'est le progrès de la philosophie
et l'avilissement de l'infâme." »
« À Helvétius, le 1er mai 1763 : "Vous pouvez plus que
toujours écraser l'erreur." »
« À d'Alembert, le 28 septembre 1763 : "J'ai toujours peur
que vous ne soyez pas assez zélé. Vous enfouissez vos talents, vous
vous contentez de mépriser un monstre qu'il faut abhorrer et détruire.
Que vous coûterait-il de l'écraser en quatre pages, ayant
la modestie de lui laisser ignorer qu'il meurt de votre main?" »
(L'Héroïsme du Clergé pendant la Révolution française, par l'abbé
Pagès, p. 4, 5, 6)
« Ils formaient une ligue (ce qui est patent), leur correspondance
en fournit d'irrécusables preuves. Le christianisme y est
désigné du nom d'infâme ou de superstition christicole; les apôtres
y sont appelés douze faquins (1). On y conseille de mépriser les
plus savants penseurs "autant que s'ils étaient des saints Pères" (2).
Il y est parlé de l'extravagance et de la fourberie de saint
Paul (3). On y voit un M. Desmarets qui s'en va faire des observations
d'histoire naturelle pour "donner le démenti à Moïse" (4).
Leur plan était si connu, que le lieutenant de police, M. Hérault,
disait à Voltaire : "Vous avez beau faire, Monsieur, quoi que vous
écriviez, vous ne viendrez pas à bout de détruire la religion chrétienne."
Et celui-ci n'hésitait pas à lui répondre : "C'est ce que
nous verrons (5)." "O mes philosophes! s'écriait le chef de la
conjuration, il faudrait marcher serrés comme la phalange macédonienne
...; vous enfouissez vos talents, vous vous contentez de
mépriser un monstre qu'il faut abhorrer et détruire ...; travaillez
donc à la vigne, écrasez l'infâme (6)." »
Sources données par Roselly de Lorgues (Le Christ devant
le siècle); (1) Voltaire, lettre à d'Alembert, 24 juin 1760. (2) Voltaire,
lettre à Damilaville, 1765. (3) Voltaire, lettre à d'Alembert,
13 janvier 1769. (4) D'Alembert, lettre à Voltaire, 30 juin 1764.
(5) Barruel, Mémoires pour servir à l'histoire du Jacobinisme.
(6) Voltaire, lettres à d'Alembert, 20 avril 1761, 28 septembre 1763,
13 février 1764. (L.-F. Hivert, éditeurs, Paris, 1842.)
(a28)
APOSTASIE DE L'ÉVÊQUE GOBEL. -- Scott,
ouvrage cité plus haut. L'abjuration de l'évêque Gobel, des évêques
Lindet, Lalande et autres fut accompagnée ou suivie de celle
de pasteurs protestants et de rabbins. Les rétractations furent
suivies d'offrandes patriotiques tirées des trésors des églises et
Synagogues : chapes, vases précieux, ornements sacerdotaux,
coupes d'argent, etc.
(a29)
L'ATHÉÏSME DE LA CONVENTION. --
Scott, ouvrage cité.
Pour rendre d'une façon vivante et concise l'attitude et les
intentions des Conventionnels en ce qui concernait la religion, Taine
les fait parler en ces termes :
« Nous avons déjà honni de France les ecclésiastiques insermentés,
environ quarante mille prêtres, et nous déportons tous
ceux qui n'ont pas franchi la frontière dans le délai fixé; nous ne
souffrons sur le sol français que les sexagénaires et les infirmes,
et encore à l'état de détenus et de reclus; peine de mort contre
eux, s'ils ne viennent pas s'entasser dans la prison de leur chef-lieu;
peine de mort contre les bannis qui rentrent; peine de mort
contre les receleurs de prêtres. Par suite, faute de clergé orthodoxe,
il n'y aura plus de culte orthodoxe. La plus dangereuse des deux
manufactures de superstition [catholicisme et protestantisme] est
fermée. ... Privé de conducteurs par ces désertions volontaires ou
forcées, le troupeau catholique se laissera aisément mener hors de
la bergerie, et, pour lui ôter la tentation d'y rentrer, nous
démolirons le vieil enclos.
» Dans les communes où nous sommes maîtres, nous nous
ferons demander, par les jacobins du lieu, L'ABOLITION DU
CULTE, et nous l'abolirons d'autorité dans les autres communes
par nos représentants en mission. Nous fermerons les églises, nous
abattrons les clochers, nous fondrons les cloches, nous enverrons
les vases sacrés à la Monnaie, nous briserons les saints, nous
profanerons les reliques, nous interdirons l'enterrement religieux,
nous imposerons l'enterrement civil, nous prescrirons le repos
décadi et le travail du dimanche.
» POINT D'EXCEPTION : puisque TOUTE RELIGION POSITIVE
est une maîtresse d'erreurs, NOUS PROSCRIRONS TOUS
LES CULTES; nous exigerons des ministres PROTESTANTS
une abjuration publique; nous défendrons aux JUIFS de pratiquer
leurs cérémonies; NOUS FERONS "UN AUTODAFÉ DE TOUS
LES LIVRES ET SIGNES DU CULTE DE MOÏSE". Mais, parmi
les diverses machines de jonglerie, c'est la catholique qui est la
pire, la plus hostile à la nature par le célibat de ses prêtres, la
plus contraire à la raison par l'obscurité de ses dogmes, la plus
opposée à l'institution démocratique, ... puisque son chef est hors
de France. ...
» RIEN NE NOUS TIENT PLUS À COEUR QUE CETTE
GUERRE AU CATHOLICISME; aucun article de notre programme
ne sera exécuté avec autant d'insistance et de persévérance,
c'est qu'il s'agit de LA VÉRITÉ : NOUS EN SOMMRS LES
DÉPOSITAIRES, les champions, les ministres, et jamais serviteurs
de la vérité n'auront appliqué la force avec tant de détail
et de suite à l'extirpation de l'erreur. ...
» À la vérité, nous avons à garder les apparences, et, en
parole, nous décréterons la liberté des cultes. Mais, en fait et
en pratique, nous détruirons l'officine et nous empécherons le
débit de la drogue; IL N'Y AURA PLUS DE CULTE CATHOLIQUE
EN FRANCE, pas un baptême, pas une confession, pas
un mariage, pas une extrême-onction, pas une messe; nul ne
fera ou n'écoutera un sermon, personne n'administrera ou ne
recevra un sacrement sauf en cachette et avec l'échafaud et la
prison pour perspective. » (Les Origines de la France contemporaine,
par H. Taine, vol. VII, Paris, Hachette, 1904, 24e éd.)
« C'est en vain que pour ranimer la ferveur on remplaça
à Paris et dans les départements les actrices par les prostituées.
L'ennui et le degoût frappèrent le nouveau culte des ses débuts.
On essaya de l'égayer par la débauche. L'église de Saint-Eustache
fut transformée en un vaste cabaret. D'anciens prêtres dansaient
la carmagnole avec des courtisanes autour de grands feux où
brûlaient missels et livres saints, chapes et reliques. Ce délire fut
propagé comme une sorte de danse macabre sur tous les points
du pays. À Lyon, un âne fut promené processionnellement, revêtu
des ornements sacerdotaux. » (L'Église et la Révolution française,
par E. de Pressensé, Paris, 1864, p. 280)
LA BIBLE LIVRÉE AUX FLAMMES. -- Dans le numéro
du 14 novembre 1793 de la Gazette nationale et Moniteur universel,
on lit :
« Le club du Musée annonce [à la Convention] que les
citoyens de cette section ont fait justice de tous les livres de la
superstition et du mensonge. Bréviaires, livres de prières, ANCIENS
ET NOUVEAUX TESTAMENTS ont expié, dans un grand feu,
les folies qu'ils ont fait commettre au genre humain. »
Un peu plus loin, le même journal raconte qu'à Lyon, après
avoir fait boire du vin à un âne en parodie de la sainte Cène, on
lui fit traîner UNE BIBLE par les rues.
« N'a-t-on pas vu pousser l'impiété jusqu'à contraindre qu'on
livrât LES LIVRES SAINTS et liturgiques pour être brûlés publiquement?
(Crimes de la Révolution française, par un curé, Paris, 1820, p. 106)
Voilà comment la « Bête qui monte de l'abîme », devait faire
« la guerre aux deux témoins, et les vaincre, et les tuer »; et
comment leurs corps morts devaient « demeurer étendus dans la
place de la grande cité ».
(
Apoc. 11.7,8)
LA MORT DES DEUX TÉMOINS, D'APRÈS JURIEU. --
Dans son livre : L'Accomplissement des prophéties, publié à
Rotterdam en 1686, (vol. II, p. 175), Pierre Jurieu commente en ces
termes le verset 8
d'
Apocalypse ch. 11 :
« Il est à observer qu'il n'y a pas dans le texte sur les
places, au pluriel, comme dans notre version française; il y a
sur la place, au singulier. Et je ne saurais m'empêcher de croire
que ceci a un particulier égard À LA FRANCE, qui est assurément
aujourd'hui la plus éminente des provinces de l'Empire du
Papisme. Son roi s'appelle le Fils aîné de l'Église, le Roy très
chrétien, c'est-à-dire très papiste, d'après la langue de Rome. Ce
sont les rois de France qui ont fait grands les papes par leurs
libéralités. C'est l'État de l'Europe aujourd'hui le plus florissant.
C'est, en un mot, la place de la grande cité. Et je crois que c'est
PARTICULIÈREMENT EN FRANCE que les témoins doivent
demeurer morts; c'est-à-dire que LA PROFESSION DE LA VÉRITABLE
RELIGION DOIT ÊTRE ENTIÈREMENT ABOLIE...
LA VÉRITÉ SERA MISE À MORT, mais elle ne sera pas
ensevelie. La sépulture est un degré au-delà de la mort, elle est
toujours conjointe avec la corruption et la destruction totale. »
L'auteur de cette étonnante interprétation faite cent sept ans
avant l'événement, naquit près de Blois, en 1637, et mourut en
1713, à Rotterdam, où il était pasteur des réfugiés français. Appelé,
de son vivant, « l'illustre Junieu », il combattit avec véhémence le
régime persécuteur qui régnait en France, et soutint une longue
et âpre controverse avec Bossuet, Maimbourg, Arnauld, Bayle et autres.
C'est nous qui avons mis les majuscules dans le texte qui précède.
Trois ans et demi. (Voir page 308.) -- La prophétie annonçait
qu'au bout de trois ans et demi -- représentés par la période
prophétique et symbolique de trois jours et demi -- on verrait
un revirement complet se produire. Cet événement se rencontre à
la date fixée par la prophétie, sur les pages de la Gazette nationale
et Moniteur universel. La proscription solennelle de tous les cultes
avait été rendue le 30 Brumaire, soit le 20 novembre 1793. Le
décret officiel de réhabilitation fut rendu par le Corps législatif
ou Conseil des Cinq-Cents le 17 juin 1797, soit au bout de trois
ans, six mois et vingt-huit jours!
(a30)
RESPONSABILITÉ RESPECTIVE DU TRÔNE ET DE L'ÉGLISE. --
Dans le saisissant tableau de Quinet, que
nous reproduisons à la note correspondant à la page 286
(Conséquences logiques de la persécution en France), cet historien semble
faire retomber sur la monarchie, sur le gouvernement civil, la
responsabilité principale desdites persécutions. La vérité exige
d'en attribuer la part principale au clergé de l'Église, guidé par
la Curie romaine. La persécution fait partie de son dogme « infaillible ».
Mgr Beaudrillart, évêque d'Himeria et plus tard cardinal,
en fait l'aveu avec une franchise étonnante lorsqu'il écrit :
« En face de l'hérésie, l'Église ne se borne pas à persuader;
les arguments d'ordre intellectuel et moral lui paraissent insuffisants;
elle a recours à la force, aux châtiments, aux supplices;
elle crée des tribunaux comme celui de l'Inquisition; elle invoque
les lois de l'État; an besoin, elle déchaîne la croisade, la guerre
sainte, la guerre de religion; et toute son "horreur du sang" ne
va dana la pratique qu'à le faire verser par le bras séculier, quand
il s'y prête, ce qui est presque plus odieux, parce qu'en apparence
moins franc, que de le verser soi-même. C'est ce qu'elle a fait
notamment au XVIe siècle à l'égard des protestants. Elle ne s'est
pas bornée à se régénérer moralement, à prêcher d'exemple, à
convertir les peuples par d'éloquents et saints missionnaires; elle
a allumé en Italie, aux Pays-Bas et surtout en Espagne, les bûchers
de l'Inquisition; en France, sous François 1er et Henri II, en
Angleterre sons Marie Tudor, elle a torturé les hérétiques; en
France et en Allemagne, pendant la seconde moitié du XVIe et
pendant la première moitié du XVIIe siècle, si elle n'a pas
commencé, du moins elle a encouragé et efficacement soutenu les
guerres religieuses. » (P. 222, 223) (Alfred Beaudrillart, professeur
à l'Institut catholique de Paris, L'Église catholique, La Renaissance,
Le Protestantisme, conférences données à l'Institut catholique,
janvier à mars 1904. Avec une lettre-préface de S. E. le cardinal
Perraud, de l'Académie française. Paris, Bloud et Cie, 1904)
(a31)
LA MISÈRE EN FRANCE APRES LA RÉVOCATION ET LES DRAGONNADES. --
« L'un des plus grands
serviteurs de la France, Vauban, dans un mémoire confidentiel
adressé à Louvois avait, dès 1688, déploré la désertion de 150 000
hommes, la sortie de 60 millions, la ruine du commerce, les flottes
ennemies grossies de 9 000 matelots, les meilleurs du royaume, les
armées étrangères de 600 officiers et de 12 000 soldats aguerris. Ce
n'était là qu'une partie de la vérité, et, dans les années qui suivirent,
l'émigration continua, bravant une répression toujours plus cruelle...
» On se rappelle les bénédictions divines que l'épiscopat
français avait annoncées à Louis XIV; en face de ces prophéties
il faut placer un document accablant, ce sont les Mémoires des
Intendants du Roi exposant la situation du royaume vers 1700;
cette enquête avait été provoquée par le duc de Beauvilliers,
gouverneur du fils du Dauphin. Dans ces in-folios manuscrits dont
Boulainvilliers publia quelques années plus tard un résumé en
trois volumes sous ce titre : État de la France, on peut voir ce
qu'avait produit l'absolutisme politique et religieux; notez que
tout y est singulièrement atténué, car c'était chose fort périlleuse
que de déplaire au Roi.
» D'après ces rapports, la population du royaume, de 22 millions
était tombée à 19; les ponts, les chaussées se dégradaient partout;
les routes étaient peu sûres, les famines périodiques; la
marine marchande était ruinée en Normandie et en Saintonge; en
certaines provinces, les propriétaires ne touchaient que la dixième
partie des fermages qui leur étaient dus; dans la généralité de
Rouen, sur 750 000 habitants, 500 000 couchaient littéralement sur
la paille. En Touraine, le tiers des laboureurs était parti; Tours
avait 80 000 habitants, il n'en a plus que 33 000; Troyes en avait
60 000, il n'en a gardé que 20 000; même décadence à Nantes, à
Caen, à la Rochelle; le Périgord a perdu le tiers de sa population;
l'Anjou, le quart, le Dauphiné, le huitième.
» En apprenant ces choses, le Roi fut consterné; Fénelon
qui les connaissait, voyait la monarchie incliner vers l'abîme;
le Conseil du Roi demanda que l'on consultât les évêques sur
la question des protestants; le cardinal de Noailles, archevêque
de Paris, inclinait vers la tolérance et rappelait l'exemple de
l'Église des premiers siècles; en dehors de lui l'épiscopat tout
entier se prononça dans un sens contraire, et, tout en avouant que
les conversions obtenues par la force étaient peu de chose, il
demanda que l'on continuât l'emploi de la contrainte en vue de
sauver les générations à venir. (Quelques Pages de l'Histoire des
Huguenots, par Eugène Bersier, Paris, Fischbacher, 1891, p. 134, 183)
« La guerre, la mortalité, les logements et passages continuels
des gens de guerre, la milice, les gros droits, la retraite des
huguenots ont ruiné ce pays... Ces mots désolants, dit Duruy,
reviennent à chaque page des mémoires que le roi demandait aux
intendants à l'intention du duc de Bourgogne, son petit-fils, sur
la situation de leurs provinces...
» Les ponts, les chemins sont dans un état déplorable et
le commerce anéanti... Dans la généralité de Rouen, sur 700 000
habitants, 650 000 ont pour lit une botte de paille. Le paysan, dans
certaines provinces, revient à l'état de sauvagerie vivant le plus
souvent d'herbes et de racines, comme les bêtes; et farouche comme
elles, il fuit quand on l'approche. "Il n'y a point de nation plus
sauvage que ces peuples", dit de ses administrés l'intendant de
Bourges; "on en trouve quelquefois des troupes à la campagne,
assis en rond au milieu d'un champ et toujours loin des chemins;
si l'on approche, cette bande se dissipe aussitôt." » (Duruy,
Histoire de France, tome II, 21e éd., p. 311)
« Sous la Régence, dit le même auteur, la noblesse [était]
accablée de dettes... les paysans en certaines provinces, manquant
de tout, même de paille pour se coucher; ceux des frontières
passant à l'étranger; beaucoup de parties du territoire incultes et
désertes. » (Idem, p. 349)
Taine cite de nombreux témoignages qui confirment et
accentuent ce tableau. (Ouv. cité, tome II, p. 200, 24e édition,
Hachette, 1920)
« Quel fut le nombre des exilés, victimes de l'Édit de
Révocation? » demande D. Bonnefon (dana son Histoire de
l'Église). Il répond : « On ne l'a pas encore précisé et peut-être
ne le saura-t-on jamais. L'émigration enleva à la France environ
500 000 protestants, 1 580 pasteurs, 2 300 ouvriers, 1 500 gentils-hommes.
L'État et le clergé s'emparèrent de dix-sept mille propriétés
confisquées à leurs légitimes possesseurs, chassés du pays de
leurs pères. Les conséquences de cette émigration furent déplorables
pour la France. La prospérité intérieure fut tout à coup
suspendue, car les protestants avaient à peu près le monopole du
commerce et de l'industrie. Par contre, ils enrichirent les contrées
qui leur donnèrent asile, et devinrent les promoteurs de leur prospérité. »
(Paris, Bonhours et Cie, p. 373)
Parlant du règne de Louis XIV, Calonne l'appelle : « Ce
règne éclatant, où l'État s'appauvrissait par des victoires, tandis
que le royaume se dépeuplait par l'intolérance. (Idem)
« Dans un mémoire portant ce titre, Pour le rappel des
Huguenots, présenté à Louvois, au mois d'octobre 1669 [Vauban]
constata que le projet de réunir tous les réformés à l'Église
catholique, apostolique et romaine avait échoué et que l'Édit
révocatoire, loin de produire les effets attendus, avait causé [des
maux innombrables]. » (G. Bonnet-Maury, Histoire de la Liberté
de Conscience en France, p. 58)
(a32)
SOUFFRANCES DU CLERGÉ ET DES CATHOLIQUES SOUS LA CONVENTION. --
Voir l'Histoire religieuse
de La Révolution française de Pierre de la Gorce, de l'Académie
française, en cinq volumes (Plon-Nourrit, Paris). Aux volumes
II et III, l'auteur décrit les exodes et les emprisonnements de curés
et d'évêques, cite les églises supprimées, démolies, désaffectées. À
Bordeaux, les catholiques, injuriés, traqués, assaillis, expulsés,
célèbrent leur culte clandestinement et la nuit. L'expulsion anti-religieuse
est accompagnée de déportation, de massacres et de
noyades de prêtres.
On calcule qu'au sortir de la Terreur la liste totale des
fugitifs et des bannis contenait plus de cent cinquante mille noms.
Il y en aurait eu davantage, si la frontière n'avait pas été
gardée par des patrouilles, si, pour la franchir, il n'avait pas fallu
risquer sa vie, déguisé, errant la nuit, en plein hiver, à travers
les coups de fusil, décidé à se sauver coûte que coûte, pour aller,
en Suisse, en Italie, en Allemagne et jusqu'en Hongrie, chercher
la sécurité et le droit de prier Dieu à leur façon. -- Si quelqu'un
des exilés ou déportés se hasarde à rentrer, on le traque comme
une bête fauve : sitôt pris, sitôt guillotiné. (Quinet, Ouvrage cité, p. 116)
(a33)
ATROCITÉS COMMISES SOUS LA TERREUR. --
« Quelque temps avant Thermidor, dit le représentant Beaulieu,
le nombre des détenus s'élevait à près de quatre cent mille; c'est
ce qui résulte des listes et des registres qui étaient alors au
Comité de Sûreté générale. Edgar Quinet dépeint la barbarie
avec laquelle étaient traités ces malheureux prisonniers, qui
expiaient en quelque sorte, et sans le savoir, les cruautés que
leurs pères avaient infligées, des siècles durant, an peuple de
Dieu. (Ouvrage cité, p. 122-124)
« ... Le meurtre après jugement ou sans jugement -- 178
tribunaux, dont 40 sont ambulants, prononcent, dans toutes les
parties du territoire, des condamnations à mort, qui sont exécutées
sur place et à l'instant. Du 10 avril 1793 an 9 Thermidor An
II, celui de Paris fait guillotiner 2625 personnes, et les juges
de province travaillent aussi bien que les juges de Paris. ... Le
relevé de ces meurtres n'est pas complet, mais on en a compté
dix-sept mille, "la plupart accomplis sans formalité, ni preuve". »
(Quinet, Idem, p. 126)
(a34)
LA RÉHABILITATION ET LA DIFFUSION DES ÉCRITURES. --
En novembre 1818, se constituait, avec l'autorisation
du gouvernement, la Société biblique protestante de Paris, le
marquis de Jaucourt étant nommé président, et le duc Decaze,
premier ministre, ayant souscrit pour mille francs. -- En 1846,
le ministre de la guerre fit transporter gratuitement les Bibles et
les Nouveaux Testaments envoyés aux troupes d'Algérie. -- En
1833, se fondait, également à Paris, la Société biblique française et
étrangère, dont le travail de trente-deux ans accusa la distribution
de 750 000 volumes et une dépense totale de 2 400 000 francs. En
1864, elle fusionnait avec la Société biblique de France, fondée la même année.
Dès 1820, la Société biblique, britannique et étrangère --
qui collaborait depuis 1804 à la diffusion de la Bible en France
-- ouvrait à Paris une Agence française, dont l'activité ne tarda
pas à éclipser celle des Sociétés parallèles, grâce à l'emploi d'un
nombre grandissant de colporteurs; en trente années -- de 1833
à 1866 -- le chiffre total des colporteurs engagés fut de 1800. En
1909, ladite société avait répandu en France, depuis 1804, 13 143 031
volumes, dont 5 844 643 par le colportage. En fait de distributions
gratuites, la même Société a envoyé 71 612 Nouveaux Testaments
aux soldats français pendant la guerre de Crimée, et un million
de volumes aux soldats français et allemands pendant la guerre
de 1870. Elle a distribué 400 000 Évangiles à l'Exposition universelle
de Paris, en 1900, 35 000 aux victimes des inondations de
1910, etc. -- Faits intéressants à noter en 1831, le ministre de
l'Instruction publique lui avait commandé 20 000 Nouveaux Testaments
pour être employés dans les écoles comme livres de classe,
et les avait payés 10 000 francs. L'année suivante, les membres du
Conseil royal avaient demandé, aux mêmes conditions, 20 000
Nouveaux Testaments, et un membre de ce conseil, inspecteur des
écoles primaires, en avait demandé 20 000 autres pour être distribués
dans les écoles de seize départements.
En 1804, selon M. William Canton, de la Société biblique,
britannique et étrangère, tous les exemplaires des Écritures en
existence dans le monde entier, en y faisant entrer les manuscrits
en toutes langues, ne s'élevaient pas au-dessus de quatre
millions. Les différentes langues représentées dans ces exemplaires,
en comptant les langues mortes, telles que le moeuso-gothique
d'Ulfilas et l'anglo-saxon de Bède, étaient au nombre de cinquante
environ. Cent ans plus tard, à la fin de son premier centenaire, la
Société biblique britannique et étrangère pouvait rapporter une
distribution totale, pour cette seule Société, de 186 680 101 exemplaires
de Bibles, Testaments ou portions des Écritures. Ce total
s'élevait, en 1910, à plus de 220 000 000 d'exemplaires, répartis en
quelque quatre cents langues différentes.
Il faut ajouter à ce total les millions d'exemplaires des
Écritures ou portions des Écritures répandus en différentes langues
par d'autres Sociétés bibliques ou maisons de commerce. La
Société biblique américaine -- fille aînée de la Société mère, celle
de Londres -- rapportait, an cours des 90 premières années de
son activité, une distribution totale de 87 296 182 exemplaires. Selon
une évaluation des plus modérées, quelque six millions d'exemplaires
des Écritures sont imprimés annuellement par diverses
maisons de commerce, ce qui, ajouté à la production totale des
Sociétés bibliques, donne le chiffre de vingt-neuf millions d'exemplaires
des Écritures mis annuellement en circulation.
Actuellement, la Bible est traduite en entier en 240 langues,
et en partie en 1 190. Il est des dialectes dont elle est la seule
littérature. Deux nouvelles versions paraissent chaque mois.
-- Les ouvrages les plus traduits, après l'Écriture sainte, sont
les écrits d'Homère, en 30 langues, ceux de Shakespeare, en 35
langues, et le Voyage du Pèlerin, de Bunyan, en 80 langues.
(a35)
MISSIONS ÉTRANGÈRES. -- Les dernières années
du dix-huitième siècle ont ouvert une ère brillante d'activité
missionnaire, qui ne le cède qu'à celle du premier siècle du christianisme.
En 1792, se fondait la Société baptiste, avec Carey comme
l'un de ses premiers missionnaires. En 1795, s'organisait la Société
missionnaire de Londres; en 1799, la future Church Missionary
Society, puis, peu après, la Société missionnaire wesleyenne. En
1812, les chrétiens d'Amérique, pris d'un zèle analogue, fondaient
le Comité américain des Missions étrangères, et, en 1814, l'Union
missionnaire baptiste. Adoniram Judson, l'un des premiers missionnaires
qui quittèrent les rives de l'Amérique, mettait la
voile pour Calcutta en 1812. En 1837, s'organisait le Comité presbytérien.
Les sociétés de missions protestantes sont au nombre de 300.
Les unes dépendent exclusivement de certaines Églises (anglicane,
épiscopale, baptiste, méthodiste, luthérienne, presbytérienne,
adventiste du septième jour, etc.). Les autres sont soutenues par
les amis des missions de toutes les Églises et n'ont aucune couleur
ecclésiastique. -- Une société de missions particulièrement intéressante,
qui date de 1732, est la Mission morave, dont le siège
est à Hernhut, en Saxe, et qui a été appelée la diaconesse des
races agonisantes : Esquimaux, Peaux-Rouges, Papous, etc. --
La Société des Missions de Bâle, fondée en 1815, la Société des
Missions de Berlin, les Sociétés scandinave, finlandaise et belge
mériteraient une mention spéciale. -- Avant la guerre de 1914-18,
25 sociétés allemandes entretenaient plus de 2 200 missionnaires.
Le protestantisme français possède une grande société de
missions fondée à Paris en 1822 : la Société des Missions évangéliques
chez les peuples non chrétiens. Cette société a donné à
l'Afrique trois hommes éminents : Eugene Casalis (1812-1891),
Adolphe Mabille (1836-1894), François Coillard (1834-1904). Elle
opère dans dix champs de travail : Dakar, Conakry, Togo, Cameroun,
Zambèze, Lessouto, Gabon, Madagascar, Tahiti et Nouvelle-Calédonie.
La Mission romande, dont le siège est à Lausanne,
a des stations dans l'Ouganda et au Transvaal. -- Les missions
en pays païens dirigées et soutenues par les adventistes du septième
jour datent de 1894 seulement. Néanmoins, elles opèrent actuellement
en 928 langues. Elles ont envoyé, depuis 1901, plus de
9 767 missionnaires.
Dans un article publié par la Missionary Review of the
World de janvier 1910, le Dr A. T. Pierson écrivait : « Il y a
un demi-siècle, la Chine, la Mandchourie, le Japon et la Corée,
la Turquie et l'Arabie, et même le vaste continent africain dormaient,
nations ermites, enfermées dans les cellules d'une longue
réclusion. L'Asie centrale comme l'Afrique centrale étaient
relativement inexplorées. En plusieurs pays, l'empire de Satan était
incontesté, et n'était l'objet d'aucune attaque... L'Italie et l'Espagne
incarcéraient quiconque était assez osé pour vendre une
Bible ou prêcher l'Évangile... Dans une grande partie des champs
païens, les portes étaient fermées et verrouillées par l'exclusion
et par le système des castes. Les changements qui se produisent
actuellement de tous côtés sont tellement remarquables, sont si
radicaux que, pour celui qui émergerait soudain du milieu du
siècle dernier, le monde serait méconnaissable. Celui qui tient les
clefs de toutes les portes les a ouvertes et a disposé tous les pays
à recevoir les messagers de la Croix. Même dans la Ville éternelle,
où, il y a un demi-siècle, le voyageur étranger devait -- avant
d'entrer -- laisser sa Bible en dehors des murailles, les Écritures
sont librement répandues, et on trouve nombre de chapelles protestantes. »
Des statistiques récentes concernant les Missions protestantes
nous apprennent que le nombre des missionnaires européens et américains
est de 69 730 dont 19 985 femmes. Quant au personnel indigène
des Missions (pasteurs, évangélistes, catéchistes, instituteurs
et institutrices) il comprend 512 696 personnes, dont 77 112 femmes.
Les Missions protestantes ont fondé de nombreux hôpitaux, dispensaires,
écoles primaires, secondaires et universités dent elles
assurent le service. Les Missions adventistes ont, pour leur part,
326 hôpitaux et dispensaires. Leurs écoles sont au nombre de
4 520 dont 10 léproseries.
(a36)
DATES PROPHÉTIQUES. -- Voir
Appendice a37.
(a37)
DATES PROPHÉTIQUES. -- Les faits historiques
et chronologiques se rapportant aux prophéties des chapitres 8
et 9 de Daniel, y compris les preuves solides fixant l'année 457
avant J.-C. comme la date véritable marquant le point de départ
de ces périodes, ont été clairement exposés par nombre d'interprètes.
Signalons, parmi les théologiens catholiques, une étude
de l'abbé Mémain : Les 70 Semaines de la Prophétie de Daniel
(Haton, 35, rue Bonaparte, Paris, 1904). Voir particulièrement les
pages 31-48. Et parmi les théologiens protestants : J.-A. Boat, qui
écrit ce qui suit : « Esdras fut mis par Artaxerxès-Longuemain à
la tête de la seconde colonie qui revint en Judée en 457. C'est à
cette même année qu'on rattache d'ordinaire aussi le commencement
des 70 semaines de
Dan. 9.24. » (Hist. des Macchabées,
p. 7, 17; -- l'Index de la Bible Segond, p. 87.) Louis Burnier,
qui dit : « La date de la commission donnée à Esdras par Artaxerxès
est une date importante, puisqu'il faut partir de là et non
d'ailleurs... pour calculer les 70 semaines de Daniel. » (Études
élémentaires, II, 457, 458; -- l'Encyclopédie des sciences religieuses,
vol. I, 621; Isaac Newton; l'astronome suisse De
Cheseaux.) -- Parmi les Anglais, il faut citer tout spécialement
l'ouvrage du célèbre astronome Sir Isaac Newton, Observations
upon the prophecies of Daniel and the Apocalypse of St. John,
ch. X, London ed., 1733, p. 128-143. Pour la date de la crucifixion,
voir Win. Hales, Analysis of Chronology, vol. I, p. 94-101 ; vol. III,
p. 164-258, 2d London ed., 1830.
(a38)
CHUTE DE L'EMPIRE OTTOMAN. -- Pour plus
de détails sur la chute prédite de l'Empire ottoman au cours du
mois d'août 1840, voir J. Litch, The Probability of the second
Coming of Christ about A. D. 1843 (publié en jam 1838); J. Litch,
An Adress to the Clergy (publié au printemps de 1840); une
seconde édition, avec nouveaux faits historiques établissant la
justesse des précédents calculs de la période prophétique, fut publiée
en 1841; The Advent Shield and Review, vol. I, 1844, no 1,
article 2, p. 56, 57, 59-61; J. N. Loughborough, The Great Advent
Movement, p. 129-132, éd. de 1905; J. Litch, article dans les Signs
of the Times and Expositor of Prophecy, du 1er février 1841.
(a39)
LES ÉCRITURES ENLEVÉES AU PEUPLE. --
Sur l'attitude de l'Église romaine relativement à la mise en
circulation des Écritures parmi le peuple en langue vulgaire, voir
Catholic Encyclopaedia, art. « Bible »; La Foi de nos Pères, par
le cardinal James Gibbons, trad. de l'abbé Saurel sur la 28e éd.
anglaise, ch. 8, Resaux-Bray, Paris, 1886; F. Bungener, Histoire
du Concile de Trente, vol. I, p. 151-163, Joël Cherbuhiez, Paris
et Genève, 1847.
(a40)
DEUX ASSAUTS DU RATIONALISME, AU
COMMENCEMENT DU XIXe ET DU XXe SIÈCLE. -- Au cours
du XVIIIe siècle et juaqu'au commencement du XIXe, le protestantisme,
dans toute l'Europe, avait été envahi par une vague de
scepticisme. Dans les chaires, comme dans les auditoires de théologie,
le vrai Évangile était remplacé par les vieilles hérésies desséchantes
autrefois professées par Arias, Socin et Pélage. Sans une
série de puissants réveils c'en était fait du protestantisme. Ces
réveils, provoqués par le souffle d'en haut, groupèrent de nombreux
croyants, en Amérique et en Angleterre, autour d'hommes tels que
Wesley et les Whitefield, en Allemagne, autour des Arndt, des
Spener, des Zinzendorf, des Bengel.
Dana les pays de langue française, le réveil fut présenté par
une pléiade d'hommes de talents divers, mais tous pareillement
touchés de la grâce, consacrés au salut des âmes, et soumis
à l'Écriture comme étant l'infaillible Parole de Dieu. Parmi les
plus distingués, nommons César Malan, H.-L. Empaytaz, H. Pyt,
Félix Neff, F. Gonthier, Ami Bost, Louis Gaussen, J.-H. Merle
d'Aubigné, A. Rochat, S. Gobat, L. Burnier, puis, plus tard,
Alexandre Vinet et Adolphe Monod, Émile Guers, le comte A. de
Gasparin. Au début, Dieu s'était servi de quatre étrangers pour
allumer, à Genève et ailleurs, la flamme de la foi aux Écritures :
Mme de Krudener, Zinzendorf, Wilcox et Haldane. Une école de
théologie, dite de l'Oratoire et deux ou trois églises indépendantes
de l'État s'organisèrent dans la ville de Calvin. Ces troupeaux
constituèrent le noyau d'un mouvement puissant qui répandit ses effets
bienfaisants dans toutes les directions. L'esprit missionnaire,
inséparable de tout vrai réveil, ne tarda pas à prendre son essor, et se
donna pour organe principal la Société évangélique, dent les
nombreux colporteurs et missionnaires allèrent fonder et édifier
des stations, des églises et des missions sur divers points de
France, en Belgique et au Canada.
Mais un nouvel assaut de l'ennemi guettait les Églises
nationales, ainsi que les Églises séparées issues de la prédication
du pur Évangile. Ce péril eût été efficacement conjuré avec les
armes que Dieu offrait en ce moment aux Églises de nouvelles
lumières, destinées à fortifier la doctrine évangélique en la ramenant
plus complètement à la Bible. Citons le baptême biblique des
seuls croyants, et par immersion; le sommeil des morts; la
destruction finale des impénitents, la prochaine venue du Seigneur,
et enfin le maintien du Décalogue intégral par le retour au jour
de repos du quatrième commandement. L'achèvement de la Réforme
comme le réclamait avec insistance A. de Gasparin eût sauvé le
protestantisme du danger mortel du modernisme. En poussant les
principes du seizième siècle et du Réveil jusqu'à leurs dernières
conséquences, tout était sauvé. Le présent livre en fait foi. En
revanche, une inconséquence, une seule -- et il y en avait une bonne
demi-douzaine -- pouvait tout perdre!
En effet, à la faveur de ces inconséquences, et grâce aux
discussions stériles et au désarroi doctrinal qui en résultaient,
un nouveau rationalisme déguisé : la « Haute Critique » soi-disant
littéraire et scientifique des textes originaux, sapait insidieusement
et battait en brèche la foi de la nouvelle génération.
Cela remonte à quarante ou soixante ans. Aujourd'hui, sauf quelques
îlots clairsemés, tout est emporté par la marée. Un des exemples
les plus significatifs et les plus attristants est peut-être la
fermeture récente de l'École de théologie de l'Oratoire, où
l'enseignement de l'autorité et de l'infaillibilité des Écritures --
véritable raison d'être de l'établissement -- avait cessé d'être donné
depuis un certain nombre d'années.
(a41)
LES OUVRAGES DE GAUSSEN SUR LA PROPHÉTIE. --
Son principal ouvrage sur la prophétie, intitulé :
Daniel le prophète exposé dans une suite de leçons pour une école
du dimanche (3 vol. in-8ème, Genève et Paris, 1839, 1848, 1849), est
un relevé sténographique revu par l'auteur. Il est malheureusement
épuisé. Un autre ouvrage prophétique du même auteur est
le discours prononcé pour la rentrée de l'École de théologie, en
1843. C'est un exposé magistral de la onzième corne de la vision
de Daniel. Ce discours, réimprimé, a pour titre : L'Antichrist et
l'accomplissement des Écritures. Brochure in-12 de 32 pages.
(a42)
ROBES D'ASCENSION. -- Fable forgée de toutes
pièces par les adversaires des adventistes en vue de jeter l'opprobre
sur leur cause. Selon cette invention, les adventistes auraient
préparé des robes spéciales pour aller à la rencontre du Seigneur.
Elle a été si activement répandue que plusieurs y ont cru; mais
des enquêtes répétées en ont établi la fausseté. Une forte récompense
a même été offerte durant plusieurs années à celui qui pourrait
donner une preuve à l'appui de cette affirmation; mais la
récompense attend encore son destinataire. Aucun de ceux qui
attendaient le retour du Seigneur n'était assez ignorant des Écritures
pour croire que des robes de leur fabrication fussent nécessaires
pour cette occasion. La seule robe dont les saints auront
besoin pour aller au-devant du Seigneur, ce sera le « vêtement
blanc, de la justice de Jésus-Christ. Voir
Apoc. 19.8.
(a43)
CHRONOLOGIE PROPHETIQUE. -- Le Dr Georges
Bush, professeur d'hébreu et de langues orientales à l'Université
de New York, dans une lettre adressée à M. Miller, et publiée
dans l'Advent Herald and Signs of the Times Reporter, Boston,
les 6 et 13 mars 1844, faisait les déclarations importantes qui
suivent touchant ses calculs des temps prophétiques. M. Bush
écrit :
« On ne saurait douter, selon moi, que vous et vos amis
n'ayez mis beaucoup de soin dans l'étude de la chronologie
Prophétique, et que vous ne vous soyez épargnés aucune peine
pour déterminer avec précision le point de départ et la fin de
ses grandes périodes. Si ces prophéties ont été insérées dans les
saints livres par le Saint-Esprit, c'est sans doute dans l'intention
qu'elles soient étudiées, et, probablement aussi, pour qu'elles
finissent par être parfaitement comprises; nul ne peut être
accusé de légèreté ou de présomption pour avoir respectueusement
tenté de le faire... En donnant à un jour la valeur prophétique
d'une année, je crois que vous êtes d'accord avec la plus saine
exégèse; en tout cas, vous êtes soutenus par de grands noms
tels que Mede, Sir Isaac Newton, Kirby, Scott, Keith et une foule
d'autres, qui sont arrivés, en somme, et depuis longtemps, aux
mêmes conclusions que vous sur ce sujet. Tous s'accordent à
reconnaître que les principales périodes de Daniel et de saint Jean se
terminent à peu près en notre temps; il serait donc peu logique
de vous taxer d'hérésie pour avoir exposé les mêmes vues que ces
éminents théologiens... Vos conclusions, dans ce domaine, ne
me semblent pas de nature à mettre en danger ni les intérêts de
la vérité ni la vie chrétienne... À mon avis, votre erreur est
ailleurs que dans vos computations chronologiques... Vous vous
êtes entièrement mépris sur la nature des événements qui doivent
se produire à l'expiration de ces périodes. C'est là le tort principal
de votre interprétation. »
(a44)
LE PUSEVISME. -- Mouvement qui pousse une
partie de l'Église anglicane dans la direction du catholicisme.
Il eut pour principal initiateur, en 1830, à Oxford (d'où le nom
de « mouvement d'Oxford »), Edouard Pusey. Ce dernier insistait
sur la succession apostolique, acceptait la doctrine de la
justification par les oeuvres, attribuait une vertu divine aux sacrements,
admettait le purgatoire, les pénitences ecclésiastiques, la messe
et les fêtes des saints. -- Il y a actuellement un millier d'églises
dites protestantes, en Angleterre, qui célèbrent la messe.
(a45)
DATES PROPHETIQUES. -- Voir la note pour
la page 355.
(a46)
LA PURIFICATION DU TABERNACLE CÉLESTE. --
Sous ce titre, on lit aux pages 495-497 du Mystère
de la Passion et Théorie de la Rédemption, par F. de Rougemont
(Neuchâtel, 1876) :
« L'oeuvre du salut opérée sur la croix ne se termine pas
brusquement au tombeau vide du Sauveur. Elle se poursuit dans les
cieux; car Jésus-Christ a "trouvé une rédemption éternelle"
(
Heb. 9.12),
et il exerce auprès de Dieu "la sacrificature qui ne
peut passer, étant toujours vivant pour intercéder"
(
Heb. 8.24, 25),
en notre faveur et pour "propitier" nos péchés
(
Héb. 2.17).
Hilaskestaï n'est point expier. Nos péchés ont été expiés une
fois pour toutes sur la croix. Dans les cieux, par sa perpétuelle
intercession, Jésus-Chnist nous maintient propice Dieu qu'irriteraient
sans lui nos péchés continuels.
» ICI S'OFFRE À NOUS TOUT UN CYCLE DE VÉRITÉS
RÉVÉLÉES QUI N'A POINT PRIS SA PLACE DANS LA
CONSCIENCE ET LA THÉOLOGIE DE L'ÉGLISE...
» L'Épître anx Hébreux nous le dit en termes si clairs
qu'ils ont ébloui et aveuglé l'Église. De même que sous l'ancienne
Loi le Lieu très saint lui-même et le temple étaient souillés par les
émanations empestées d'Israël et "devaient être purifiés chaque
année à la grande fête des expiations par le sang des victimes",
il était de même nécessaire que le tabernacle céleste, "plus
grand et plus parfait que l'autre", au moment où il allait s'ouvrir
à la race déchue d'Adam, fût purifié... par Jésus-Christ. »
(a47)
UN TRIPLE MESSAGE. -- La teneur du message
du premier ange nous est donnée dans
Apoc. 14.6, 7. Le
prophète ajoute : « Et un autre, un second ange le suivit, en
disant : Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande...
Et un autre, un troisième ange les suivit. » Le terme rendu dans
ce passage par « suivit » signifie, employé de la même manière,
« aller avec ». Le lexique de Liddell and Scott rend ainsi ce
terme : « Suivre quelqu'un, aller derrière lui ou avec lui. » Celui
de Robinson dit : « Suivre, aller avec, accompagner quelqu'un. »
C'est le même terme qui est employé dans
Marc 5.24 : « Jésus
alla avec lui, et une grande foule le suivait et le pressait de
tous côtés. » Il est appliqué aux 144 000, quand il est dit : « Ceux-là
suivent l'agneau partout où il va. »
(
Apoc. 14.4) Il est évident
que, dans ces deux passages, la pensée est : aller ensemble,
agir de concert. Dans
1 Cor. 10.4, où il est écrit que les enfants
d'Israël « buvaient à un rocher spirituel qui les suivait », le mot
« suivait » est traduit du même vocable original. Il faut en conclure
que l'idée exprimée dans
Apocalypse 14.8 et 9 n'est pas seulement
que les second et troisième messages se suivent, chronologiquement
parlant, mais qu'ils se rejoignent et opèrent ensemble.
Les trois messages ne sont en réalité qu'un triple message. Ils
sont trois dans l'ordre de leur naissance. Mais dès qu'ils sont nés,
ils marchent ensemble et deviennent inséparables.
(a48)
SUPRÉMATIE DES ÉVÊQUES DE ROME. --
Quelques-unes des principales circonstances qui portèrent l'évêque
de Rome à la suprématie sont esquissées dans l'Histoire ecclésiastique
de Mosheim, second siècle, livre II, chap. IV, section 9-11.
Voir aussi Gieseler, 1ère période, 3ème div., ch. IV, sec. 66, par. 3;
et J. N. Andrews, History of the Sabbath, p. 276-279, 3rd ed., revised.
(a49)
PURIFICATION DU TABERNACLE CÉLESTE. --
Voir note pour la page 455.
(a50)
ÉDIT DE CONSTANTIN. --
Voir note pour la page 52.
(a51)
L'ÉGLISE D'ABYSSINIE. -- Sur l'observation
de l'ancien sabbat en Abyssinie, voir le Doyen A. P. Stanley,
Lectures on the History of the Eastern Church, lecture I, par. 15
(N. Y. ed. 1862, p. 96, 97); Michael Geddes, Church History of
Ethiopia, p. 87, 88, 311, 312; Gibbon, Décadence et Chute de
l'Empire romain, Paris, Desrez, 1840, tome II, ch. 47, page 304,
col. I; Samuel Gobat, Journal of three Year's Residence in Abyssinia,
p. 55-58, 83, 93, 97, 98 (N. Y. ed., 1850) ; A. H. Lewis,
A Critical History of the Sabbath and the Sunday in the Christian
Church, p. 208-215 (2d ed. rev.).
(a52)
PRÉROGATIVES PAPALES. --
Voir la note pour la page 58.